La philosophie politique et la psychanalyse ont en partage un problème essentiel à la vie des hommes et des sociétés, ce mécontentement sourd qui gangrène leur existence. Certes, l'objet de l'analyse reste la quête des origines, la compréhension de l'être intime, de ses manquements, de ses troubles et de ses désirs. Seulement il existe ce moment où savoir ne suffit pas à guérir, à calmer, à apaiser. Pour cela, il faut dépasser la peine, la colère, le deuil, le renoncement et, de façon plus exemplaire, le ressentiment, cette amertume qui peut avoir notre peau alors même que nous pourrions découvrir son goût subtil et libérateur. L'aventure démocratique propose elle aussi la confrontation avec la rumination victimaire. La question du bon gouvernement peut s'effacer devant celle-ci : que faire, à quelque niveau que ce soit, institutionnel ou non, pour que cette entité démocratique sache endiguer la pulsion ressentimiste, la seule à pouvoir menacer sa durabilité? Nous voilà, individus et État de droit, devant un même défi : diagnostiquer le ressentiment, sa force sombre, et résister à la tentation d'en faire le moteur des histoires individuelles et collectives.
Né en 1903, mort en 1985, Jankélévitch connu les succès au crépuscule de sa vie et fut l'un des philosophes alors les plus médiatiques. Il est aujourd'hui le penseur qui convient pour conjurer la désespérance et le pessimisme. Jankélévitch nous apprend le charme de l'instant, les joies de l'action, nous met en garde contre les conformismes de la pensée et les mondes enrégimentés. C'est le pianiste de la philosophie, il joue sur les concepts comme sur un clavier. Ne manquons pas notre unique matinée de printemps. Jankélévitch disciple d'Alain nous montre que c'est l'heure, que cette heure ne dure qu'un instant. Le vent se lève, c'est maintenant ou jamais. Cynthia Fleury, philosophe, psychanalyste, auteur à succès d'ouvrages sur la fin du courage, le soin ou le ressentiment nous offre un été avec Jankélévitch allègre plein de paradoxes sur le temps et son irréversibilité. Un dialogue sur la jeunesse d'esprit qui est le meilleur remède contre les passions tristes qui nous menacent.
Chaque époque affronte, à un moment de son histoire, son seuil mélancolique. De même, chaque individu connaît cette phase d'épuisement et d'érosion de soi. Cette épreuve est celle de la fin du courage. Comment convertir le découragement en reconquête de l'avenir ? Notre époque est celle de l'instrumentalisation et de la disparition du courage. Mais ni les démocraties ni les individus ne peuvent en rester à ce constat d'impuissance. Nul ne résiste à cet avilissement moral et politique. Il s'agit de surmonter ce désarroi et de retrouver le ressort du courage, pour soi, pour nos dirigeants si souvent contre-exemplaires, pour nos sociétés livrées à une impitoyable guerre économique. Le plus sûr moyen de s'opposer à l'entropie démocratique reste l'éthique du courage et sa refondation comme vertu démocratique. Dans cet essai enlevé, Cynthia Fleury rappelle qu'il n'y a pas de courage politique sans courage moral et montre avec brio comment la philosophie permet de fonder une théorie du courage qui articule l'individuel et le collectif. Car si l'homme courageux est toujours solitaire, l'éthique collective du courage est seule durable. Cynthia Fleury, philosophe, professeur à l'American University of Paris, travaille sur les outils de la régulation démocratique. Elle a publié de nombreux ouvrages, dont Les Pathologies de la démocratie (Fayard, 2005).
Tel est le chemin éternel de l'humanisme : comment l'homme a cherché à se construire, à grandir, entrelacé avec ses comparses, pour grandir le tout, et non seulement lui-même, pour donner droit de cité à l'éthique, et ni plus ni moins aux hommes. Quand la civilisation n'est pas soin, elle n'est rien.
Cynthia Fleury
Soigner, la chose est ingrate, laborieuse, elle prend du temps, ce temps qui est confisqué, ce temps qui n'est plus habité par les humanités. Ici se déploie une tentative de soigner l'incurie du monde, de poser au coeur du soin, de la santé, et plus généralement, dans nos relations avec les autres, l'exigence de rendre la vulnérabilité capacitaire et de porter l'existence de tous comme un enjeu propre, dans toutes les circonstances de la vie.
Cynthia Fleury expose une vision humaniste de la vulnérabilité, inséparable de la puissance régénératrice des individus ; elle conduit à une réflexion sur l'hôpital comme institution, sur les pratiques du monde soignant et sur les espaces de formation et d'échanges qui y sont liés, où les humanités doivent prendre racine et promouvoir une vie sociale et politique fondée sur l'attention créatrice de chacun à chacun.
Nous ne sommes pas remplaçables. L'État de droit n'est rien sans l'irremplaçabilité des individus.
L'individu, si décrié, est souvent défini comme le responsable de l'atomisation de la chose publique, comme le contempteur des valeurs et des principes de l'État de droit. Pourtant, la démocratie n'est rien sans le maintien des sujets libres, rien sans l'engagement des individus, sans leur détermination à protéger sa durabilité. Ce n'est pas la normalisation - ni les individus piégés par elle - qui protège la démocratie. La protéger, en avoir déjà le désir et l'exigence, suppose que la notion d'individuation - et non d'individualisme - soit réinvestie par les individus. "Avoir le souci de l'État de droit, comme l'on a le souci de soi", est un enjeu tout aussi philosophique que politique.
Après Les pathologies de la démocratie et La fin du courage, Cynthia Fleury poursuit sa réflexion sur l'irremplaçabilité de l'individu dans la régulation démocratique. Au croisement de la psychanalyse et de la philosophie politique, Les irremplaçables est un texte remarquable et plus que jamais nécessaire pour nous aider à penser les dysfonctionnements de la psyché individuelle et collective.
"Ce livre donne une joie étrange, comme celle que peut engendrer la vision d'un flocon de neige dansant entre terre et ciel, ivre d'aller à la rencontre de sa propre mort.
La toupie d'une pensée tourne avec les pages. Sa pointe est appuyée sur cette intuition : la parole audible, seule digne d'être écoutée car seule vraie, est la parole qui renonce à être sa propre lumière, pour s'éprouver buée sur le miroir du langage seul divin. Telle est la parole du poète, ou celle de l'imâm.
La belle invention de ce livre est de détacher l'écrivain de toute appartenance esthétique, et le saint de toute soumission doctrinale. Encore faut-il préciser : personne n'est poète. Personne n'est saint. Seul le langage l'est quand il renonce à saisir l'insaisissable et qu'il n'est plus qu'un effet de sidération du poète ou du priant. La vérité n'est pas atteinte dans le chant du soufi, pas plus qu'elle ne l'est dans la phrase surnaturellement obscure de Mallarmé. C'est l'inverse : ce sont eux - le soufi qui tourne autour de la poussière de son âme, et le poète qui demande à l'univers mutique d'écrire son livre absolu - qui sont soudain malgré eux atteints par la vérité informulable. Blessés par la lumière. À terre."
Christian Bobin
Notre monde est fini et nous en faisons partie. La biodiversité et l'humanité ont leurs destins intimement liés, tant la protection de la première ne va pas sans la protection des relations sociales qui tissent la seconde. Il est urgent de redéfinir les relations des différents acteurs de la biodiversité pour réconcilier biodiversité et société.
Aujourd'hui, les relations entre biodiversité et société sont formalisées à toutes les échelles, de la gouvernance mondiale (conférences de Copenhague, de Nagoya...) aux stratégies des entreprises : ce lien unit les acteurs politiques, sociaux et économiques pour parler du monde naturel qui nous entoure et avec lequel nous interagissons sans cesse. Mais, historiquement, ce sont les associations de protection de la nature qui se sont souciées les premières de la biodiversité et de la nécessité impérieuse d'alerter l'opinion. Comment peuvent-elles aujourd'hui dépasser leur statut de dissidence et intégrer certains processus de gouvernance ? Plus généralement, comment fonder un pacte social qui lie les citoyens avec la nécessaire protection et gestion de la nature ?
Ce sont les questions auxquelles répond cet ouvrage collectif, qui réunit les meilleurs chercheurs dans toutes les disciplines liées à ce sujet.
"Cynthia Fleury, philosophe et psychanalyste, défriche de nouvelles pistes de réflexion sur le courage et l'expérience du découragement. En tant que psychanalyste, elle observe l'intime du découragement chez ses patients, et remarque les effets pervers de l'organisation du monde du travail et de l'espace politique, sur le psychisme des individus. Convoquant tour à tour Victor Hugo, Diogène, Jankélévitch ou bien encore Amartya Sen, Cynthia Fleury questionne les liens entre l'expérience personnelle du découragement et la société. À partir du registre individuel, elle élargit sa réflexion au domaine collectif et politique. On découvre alors combien le courage comme dépassement de soi est aussi un élément régulateur de la démocratie, tandis que la philosophe trace en parallèle une éthique du courage, projet éminemment politique. C'est au coeur du découragement que survient le courage, qu'un sursaut du sujet et des peuples se fait, que la possibilité d'un nouveau commencement advient. Dans un langage clair et précis, Cynthia Fleury nous emmène vers la reconquête du Courage, vers de nouveaux possibles." Claude COLOMBINI FRÉMEAUX
« Toute la question, maintenant, est celle de la durabilité de la prise de conscience et de la volonté de faire autrement » Cynthia Fleury.
The greatest threat to modern democracy comes from within and it has a name: resentment. Stemming from feelings of inferiority in relation to others, resentment is a diffuse and obsessive loathing, coupled with delusions of victimhood, which clouds one's judgment and perspective, so that an individual's capacity to act and heal is paralyzed. Without the ability to heal, resentment can give rise to violent impulses, to the rejection of the rule of law, the proliferation of conspiracy theories, and the urge to use violent means to try to regain control of one's life. As individuals and as societies, we face the same challenge: how to diagnose resentment and its dark forces, and how to resist the temptation to allow it to become the motor of our individual and collective histories. This bestselling and highly original account of the psychic forces shaping modern societies will be of great interest to anyone concerned about the crisis of democracy today and what we can do to address it.
S'est fait ressentir le besoin de disposer d'un manifeste qui viendrait poser sans hiérarchie ce qui ne peut nous être volé, du silence à l'horizon, de la santé au temps long, de même que les méthodes et approches qui permettraient d'éviter que ce vol ait lieu. Cette charte aurait vocation à inspirer tous ceux qui ont besoin de réarmer leur désir, de s'appuyer sur quelques compagnons déjà constitués, de partager des méthodes de conception et de déploiement et d'arpenter ensemble les chemins de la ' vie bonne '. Car nous sommes des hommes dont l'humanisme est fragile ; et chacun d'entre nous tisse dans la matière de sa vie des façons de se lier à des collectifs plus régulateurs, tout en assumant un principe d'individuation digne de ce nom, test de crédibilité de l'État de droit. Il s'agit dès lors d'inventer une technique de la furtivité - d'où cette charte tient sa désignation, le Verstohlen -, c'est-à-dire de maintien au monde en y consolidant nos pouvoirs d'agir et nos libertés.
La nature nous relie les uns aux autres et à l'ensemble du vivant.
La nature nous relie les uns aux autres et à l'ensemble du vivant.
Mais quelles expériences avons-nous aujourd'hui de la nature ?
Celles-ci, ou leur absence, façonnent-elles nos façons de vivre et de penser, d'agir et de gouverner ? Existe-t-il une valeur ajoutée de l'expérience de nature pour l'éthique et la politique ? Il est urgent de préserver un " souci de la nature " qui soit au cœur des institutions, des politiques publiques, de nos dynamiques de transmission et d'apprentissage.
Cet ouvrage, s'affranchissant des frontières disciplinaires, interroge, de l'enfance à l'âge vieillissant, de l'individu aux différents collectifs qui organisent nos vies, la spécificité des expériences de nature, et de leur éventuelle extinction, l'hypothèse de l'amnésie environnementale, ou à l'inverse les nouveaux modes de partage et de reconnexion avec la nature, et leur continuum avec notre humanisme.
Une invitation à inventer un mode de partage.