La philosophie politique et la psychanalyse ont en partage un problème essentiel à la vie des hommes et des sociétés, ce mécontentement sourd qui gangrène leur existence. Certes, l'objet de l'analyse reste la quête des origines, la compréhension de l'être intime, de ses manquements, de ses troubles et de ses désirs. Seulement il existe ce moment où savoir ne suffit pas à guérir, à calmer, à apaiser. Pour cela, il faut dépasser la peine, la colère, le deuil, le renoncement et, de façon plus exemplaire, le ressentiment, cette amertume qui peut avoir notre peau alors même que nous pourrions découvrir son goût subtil et libérateur.L'aventure démocratique propose elle aussi la confrontation avec la rumination victimaire. La question du bon gouvernement peut s'effacer devant celle-ci:que faire, à quelque niveau que ce soit, institutionnel ou non, pour que cette entité démocratique sache endiguer la pulsion ressentimiste, la seule à pouvoir menacer sa durabilité? Nous voilà, individus et État de droit, devant un même défi:diagnostiquer le ressentiment, sa force sombre, et résister à la tentation d'en faire le moteur des histoires individuelles et collectives.
Dans cet essai qui a beaucoup été repris dans la presse, Cynthia Fleury rappelle qu'il n'y a pas de courage politique sans courage moral et montre comment la philosophie permet de fonder une théorie du courage qui articule l'individuel et le collectif. Un texte aussi passionnant à lire pour soi que pour réfléchir aux graves défis auxquels sont confrontées nos démocraties.
Nous ne sommes pas remplaçables. L'État de droit n'est rien sans l'irremplaçabilité des individus. L'individu, si décrié, est souvent défini comme le responsable de l'atomisation de la chose publique, comme le contempteur des valeurs et des principes de l'État de droit. Pourtant, la démocratie n'est rien sans le maintien des sujets libres, rien sans l'engagement des individus, sans leur détermination à protéger sa durabilité. Ce n'est pas la normalisation - ni les individus piégés par elle - qui protège la démocratie. La protéger, en avoir déjà le désir et l'exigence, suppose que la notion d'individuation - et non d'individualisme - soit réinvestie par les individus. «Avoir le souci de l'État de droit, comme l'on a le souci de soi», est un enjeu tout aussi philosophique que politique. Après Les pathologies de la démocratie et La fin du courage, Cynthia Fleury poursuit sa réflexion sur l'irremplaçabilité de l'individu dans la régulation démocratique. Au croisement de la psychanalyse et de la philosophie politique, Les irremplaçables est un texte remarquable et plus que jamais nécessaire pour nous aider à penser les dysfonctionnements de la psyché individuelle et collective.
L'imagination est-elle une faculté créatrice donnant naissance à un monde réel et non à un monde irréel ? Quelle est la nature de ce monde auquel l'imagination donne accès ? Est-il un monde intelligible, un monde sensible ou un monde imaginal, soit un intermonde des formes imaginales ? C'est quand l'imagination devient principe de réalité et d'événement que l'âme quitte son exil occidental pour accomplir son "lever" oriental.
On approche alors d'un monde imaginal, situé entre sensible et intelligible, entre spiritualité et corporalité. L'Orient et l'Occident s'absentent alors de la géographie pour devenir les pôles métaphysiques de la pensée. Le souci de l'autre (qu'il manifeste le réel, dieu, ou le prochain) est indissociable d'une herméneutique permanente posant la distance (intellectuelle ou éthique) au coeur de son intrigue significative.
L'un, grâce à l'interprétation imaginale (écriture et lecture du texte), découvre le sens de son humanité et le secret de sa subjectivité.
« Il se trouve que je me suis tenu un jour dans un lit d'hôpital, au dernier degré du désespoir. Quand soudain, la lecture de Pretium doloris de Cynthia Fleury orchestra ma rémission, m'intima de me relever. Le philosophe annonçait que l'accident offre l'occasion de se pencher sur soi, de recomposer l'espace, de réinventer la vie. Mais on aurait grand tort de réduire Pretium doloris à un guide de survie. Car la douleur, nous dit l'auteur, n'est pas l'apanage des blessés de la vie. Il n'y a pas besoin d'un accident physique pour comprendre que la vie nous couvre de ses bleus. Il y a besoin de Cynthia Fleury pour savoir quoi tirer de la difficulté d'être. »
Où en sommes-nous de la démocratie française ? Qu'avons-nous fait des valeurs et des principes prônés par la démocratie naissante de 1789 ? Dans quelle mesure sont-ils toujours opérants ? Pourquoi, et par quels processus, certains d'entre eux se sont-ils pervertis Quel prix payer pour que la démocratie reste le meilleur garant des principes qu'elle instaure ? Comment concevoir un destin commun à l'ère de l'individualisme collectif ? En un mot, comment conduire la démocratie à l'âge adulte ?
L'auteur est entré en philosophie avec un travail sur les rapports entre philosophie islamique et néoplatonisme à la Renaissance. Mallarmé et la parole de l'imâm s'insère dans cette démarche de rapprochement de voies d'inspiration apparemment divergentes, ici la poétique mallarméenne et ce qu'elle appelle la "parole de l'imam". Mallarmé et l'imâm savent ce qui les sépare de Dieu ou de la poésie : c'est eux-mêmes.
Le voile, symbole de la descente de l'Idée, devient le lieu de la conquête poétique du soi. A l'instar de l'imâm, le poète connaît le peu de valeur d'un sens découvert : entre le sens et la littérature, il y a l'Idée ou la subtilité de la musique. Cette alchimie du sens et de la littérature, c'est proprement de l'in-ouï, l'ampleur du vers mallarméen conjugué au vent naturel qui souffle dans la demeure d'Igitur, héros d'un "conte" qui "s'adresse à l'Intelligence du lecteur qui met les choses en scène, elle-même", selon les mots du poète français luimême.
Autre oeuvre de rapprochement, Les Noces d'Hérodiade. La noce ne dit plus la fusion, mais la condition phénoménale du monde et la vérité de l'intelligibilité. Le monde apparaît parce que la noce existe. Faceà- face ultime entre science de l'imâm et parole poétique : Hérodiade, nom divin, "pierre précieuse", est indissociable d'une effectivité qui se traduit dans le verbe du prophète.
Pourquoi « dialoguer » avec l'Orient ? Le dialogue se serait-il rompu ? A-t-il d'ailleurs jamais réellement existé ? Les divisions renforcées du monde d'aujourd'hui nous invitent, sans doute, à remanier les schèmes de la Renaissance, pour les dépasser.
Cette époque signe en effet un rapport fécond entre Orient et Occident, notamment grâce à deux foyers du platonisme, celui de Perse et celui de la Renaissance florentine, pouvant s'articuler au-delà des territoires et des siècles. C'est en convoquant Marsile Ficin, Sohravardî, Nicolas de Cues, Rûzbehân, Pic de la Mirandole, Ibn Arabî et Giordano Bruno, que Cynthia Fleury relit ces échanges et reformule nos héritages communs.
La nature nous relie les uns aux autres et à l'ensemble du vivant. Mais quelles expériences en avons-nous aujourd'hui??
Celles-ci, ou leur absence, façonnent-elles nos façons de vivre et de penser, d'agir et de gouverner?? Existe-t-il une valeur ajoutée de l'expérience de nature pour l'éthique et la politique?? Il est urgent de préserver un «?souci de la nature?» qui soit au coeur des institutions, des politiques publiques, de nos dynamiques de transmission et d'apprentissage.
Cet ouvrage, s'affranchissant des frontières disciplinaires, interroge, de l'enfance à l'âge vieillissant, de l'individu aux différents collectifs qui organisent nos vies, la spécificité des expériences de nature, et de leur éventuelle extinction. Il aborde également l'hypothèse de l'amnésie environnementale, mais aussi les nouveaux modes de partage et de reconnexion avec la nature, et leur continuum avec notre humanisme.
Une invitation à inventer un mode de partage.
Qu'est-ce qu'être fragile aujourd'hui ? La fragilité physique semble, a priori, mieux maîtrisée au fur et à mesure que progresse la médecine. Mais d'autres fragilités demeurent prégnantes et même s'accroissent.
La solitude, l'exclusion, l'absence de considération, la marginalisation constituent une réalité de notre époque.
L'individualisme, de nouvelles formes de peur, le rejet des différences, l'obligation de réussir coûte que coûte, et puis la doctrine de la perfection, participent à ce que la fragilité soit en premier lieu jugée comme un fardeau.
Prendre conscience de sa fragilité, accepter sa fragilité, faire reconnaître sa fragilité : il est sans doute en effet d'autant plus difficile d'y parvenir à une époque où gagner, conquérir, posséder, dépasser constituent le vocable dominant.