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Prix
Georges Bataille
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«Un jour, enfin, à l'heure où le soleil oblique de six heures éclairait la salle de bains, un oeuf à demi gobé fut envahi par l'eau et, s'étant empli avec un bruit bizarre, fit naufrage sous nos yeux ; cet incident eut pour Simone un sens extrême, elle se tendit et jouit longuement, pour ainsi dire buvant mon oeil entre ses lèvres. Puis, sans quitter cet oeil sucé aussi obstinément qu'un oeil, elle s'assit, attirant ma tête, et pissa sur les oeufs flottants avec une vigueur et une satisfaction criantes.»Un jeune garçon de seize ans tombe éperdument amoureux de la jeune Simone, s'adonnant à des jeux sexuels inventifs, les deux adolescents emportent dans leur débauche une dénommée Marcelle, facilement influençable. À trois désormais, ils vont toujours plus loin dans la frénésie et la transgression, comme envoutés par leurs sens. Une clé psychanalytique éclairera à la fin, offrant une deuxième lecture de ce texte unique.Publié clandestinement en 1928 sous pseudonyme, cette oeuvre dérange autant qu'elle intrigue. Le lecteur est ébloui et aveuglé par une écriture inclassable : ni érotique, ni pornographique, ni même entre les deux. L'Histoire de l'oeil ou qu'est-ce qui sépare l'horreur du sublime ?
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Le projet de ce livre est de réunir les plus remarquables des courts textes critiques consacrés par Georges Bataille à la littérature. Pas à sa littérature propre - on ne le lira pas ici la définir -, mais à celles des autres, ses contemporains pour la plupart. Ils datent tous d'après la guerre, c'est-à-dire, dans la vie qui a été la sienne, aux dix premières années de la revue Critique, qu'il a créée à la Libération et qu'il a dirigée jusqu'à sa mort (1962). On ne le lira pas certes pas définir ici la littérature selon lui, « définition » qu'il s'est, il est vrai, toujours abstenu de formuler précisément ; il n'empêche, le lisant lire ses contemporains, on l'entend former une autre affirmation, et complémentaire, de sa propre représentation de la littérature, de son « rôle », comme on disait alors - de son absence de rôle, plus justement.
Précisément : contre Sartre. La littérature doit servir dit l'un ; s'asservissant, dit l'autre, la littérature n'en est plus une.
Son grand livre sur ce sujet, sur le sujet de la littérature, celui où se mesure le mieux le sens qu'il en a, le sens et l'exigence, considérables, irréductibles, qu'il en a, c'est La Littérature et le mal (1957). Grand livre (théorique), mais livre restrictif aussi. Idée d'éditeur, ou idée d'auteur qui sait que le temps et les forces lui manqueront pour en concevoir un plus ambitieux. La Littérature et le mal : huit textes, sur huit écrivains selon son goût et son coeur , essentiels (Brontë, Baudelaire, Blake, Genet, Kafka, Michelet, Proust, Sade.), mais... qui y manque-t-il ? Beaucoup qu'on peut sans mal imaginer. Qu'il n'y a pas même lieu d'imaginer, il le dit lui-même : « Il manque à cet ensemble une étude sur Les Chants de Maldoror. » Cette étude manque, certes, mais il ne manque pas qu'elle. Il manque après coup, le temps venu de faire le compte des oeuvres qui se sont imposées depuis les années 1950-1960, toutes celles que ce livre réunit, et que lui-même aurait peut-être réunies si le temps lui en avait été laissé. Un seul exemple: la première étude en France sur Beckett (sur Molloy), c'est lui qui l'écrit. C'est un choix parmi ces textes que propose ce livre auquel il a semblé bon de donner ce titre - Non serviam -, parce que c'est la devise du diable, dit-on, et parce que la littérature, selon Bataille, est et se doit d'être diabolique. -
À la mort de son père, Pierre tombe sous la griffe d'une femme terrifiante et sulfureuse, à l'adoration dévoratrice : sa mère. Initié par elle à l'orgie et la débauche, l'adolescent découvre une vie de perdition où se mêlent honte, jouissance, dégoût et respect. Face à un monde en dérive, perverti, comment aimer encore et apprendre à grandir ?
Roman posthume, Ma mère est l'un des textes les plus scandaleusement beaux de Georges Bataille, qui disait de lui-même : " Je ne suis pas un philosophe, mais peut-être un saint, peut-être un fou. " -
Les êtres qui se reproduisent, les êtres reproduits, sont des êtres distincts entre eux, séparés par un abîme, une fascinante discontinuité. Mais, individus mourant isolément dans une aventure inintelligible, nous gardons la nostalgie de la continuité perdue. L'activité sexuelle de reproduction, dont l'érotisme est une des formes humaines, nous la fait retrouver ; au moment où les cellules reproductrices s'unissent, une continuité s'établit entre elles pour former un nouvel être à partir de leur mort.
C'est aussi par la mort, la mort violente, que cet effort de libération s'est manifesté dès l'origine des activités de l'homme. Mais le désir de meurtre met en cause toute l'organisation de communautés fondées sur le travail et la raison. D'où la naissance d'interdits, à quoi s'oppose, ou plutôt s'ajoute, en un dépassement nécessaire, leur propre transgression. Guerre et chasse rejoignent ici l'inceste ou l'orgie sacrée...
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Lors de la parution de La Part maudite, en 1949, Georges Bataille révélait qu'il travaillait depuis dix-huit ans à l'élaboration de cette représentation du monde, dont, seize ans auparavant, " La notion de dépense " - publiée dans la revue La Critique sociale - constituait une première approche.
Pour Georges Bataille, La Part maudite abordait, " en dehors des disciplines particulières, un problème [...] à la clé de tous ceux que pose chaque discipline envisageant le mouvement de l'énergie sur la terre - de la physique du globe à l'économie politique, à travers la sociologie, l'histoire et la biologie [...]. Même ce qui peut être dit de l'art, de la littérature, de la poésie est en rapport au premier chef avec le mouvement [...] de l'énergie excédante, traduit dans l'effervescence de la vie ".
Le sens le plus intime de cette entreprise est donné par le fait que cette ébullition du monde, voué à l'" abandon ", à l'" écoulement " et à l'" orage ", est conçue à l'image de celle qui n'a cessé d'animer la vie de l'auteur. Aussi La Part maudite occupe-t-elle une place centrale dans l'oeuvre de Georges Bataille.
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Georges Bataille (1897-1962) est une figure singulière dans la philosophie et l'anthropologie contemporaines. Son itinéraire - profondément désordonné et tout à la fois spirituel, politique et littéraire - répond, par-delà les limites du convenu, à la volonté de révéler une vue souveraine, dégagée des servitudes qu'impose la vie. L'expérience intérieure en fournit une belle illustration, qui s'interroge sur la souffrance s'avouant du désintoxiqué, une fois que l'homme se convainc de ses deux seules certitudes : qu'il n'est pas tout et qu'il est mortel. Alors l'esprit se meut dans un monde étrange où l'angoisse et l'extase se composent. Bataille en décrit ainsi le mouvement : «C'est jouer l'homme ivre, titubant, qui, de fil en aiguille, prend sa bougie pour lui-même, la souffle, et criant de peur, à la fin, se prend pour la nuit».
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«Dans cette nuit opaque, je m'étais rendu ivre de lumière ; ainsi, de nouveau, Lazare n'était devant moi qu'un oiseau de mauvais augure, un oiseau sale et négligeable. Mes yeux ne se perdaient plus dans les étoiles qui luisaient au-dessus de moi réellement, mais dans le bleu du ciel de midi. Je les fermais pour me perdre dans ce bleu brillant : de gros insectes noirs en surgissaient comme des trombes en bourdonnant.» G. B.
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Madame Edwarda ; le mort ; histoire de l'oeil
Georges Bataille
- 10/18
- Domaine Français
- 14 Mai 2002
- 9782264035790
Penser ce qui excède la possibilité de penser, gagner le point où le coeur manque, les moments où l'horreur et la joie coïncident dans leur plénitude, où l'être nous est donné dans un dépassement intolérable de l'être qui le rend semblable à dieu, semblable à rien.
Tel est le sens de ce livre insensé. les trois récits rassemblés ici sont l'expression la plus concise de la terrible exigence d'un homme qui avait voué sa vie et son écriture à l'expérience des limites.
à travers le blasphème et l'indécence, c'est bien la voix la plus pure que nous entendons et le cri que profère cette bouche tordue est un alléluia perdu dans le silence sans fin.
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«La littérature est l'essentiel, ou n'est rien. Le Mal - une forme aiguë du Mal - dont elle est l'expression, a pour nous, je le crois, la valeur souveraine. Mais cette conception ne commande pas l'absence de morale, elle exige une hypermorale.La littérature est communication. La communication commande la loyauté : la morale rigoureuse est donnée dans cette vue à partir de complicités dans la connaissance du Mal, qui fondent la communication intense.La littérature n'est pas innocente, et, coupable, elle devait à la fin s'avouer telle. L'action seule a les droits. La littérature, je l'ai, lentement, voulu montrer, c'est l'enfance enfin retrouvée. Mais l'enfance qui gouvernerait aurait-elle une vérité ?»Georges Bataille.
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Sous le patronage du désir et de la mort, de la volupté et de l'horreur, Georges Bataille explore les passions irrépressibles de l'homme. À travers une histoire intuitive de la peinture, depuis la Préhistoire jusqu'au Surréalisme, il jette une lumière implacable sur notre grandeur et notre tragique. Pour qu'au seuil de la raison, le coeur exulte.
L'ultime ouvrage de Georges Bataille, dans lequel il livre le sens caché de son art, aux souffles poétique et philosophique saisissants.
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Ouvrage historique à plus d'un titre que celui que Georges Bataille consacra à Lascaux.
Dans ce livre paru en 1955, quinze ans après la découverte de la grotte, l'écrivain se propose de formuler une première synthèse philosophique qui vienne en quelque sorte unifier les relevés de la science. Procédant avec une nécessaire prudence, dans le tâtonnement d'observations progressives et d'hypothèses fragiles, complétées et rectifiées au fil des avancées de la recherche, ces spécialistes que sont les préhistoriens ne peuvent se permettre de prendre toute la mesure de leurs propres découvertes, explique Bataille ; c'est aussi ce qui les empêche de « célébrer » Lascaux comme l'un des sites, sinon le site même de la « naissance de l'art ». Cette tâche revient à la philosophie. En s'appuyant au garde-fou de la rigueur scientifique, décrire cette « aurore » de l'humanité, ce « miracle de Lascaux » qui supplante ce qu'on nommait jusqu'alors « miracle grec » : tel est en somme le but inédit que s'assigne Bataille.
Aujourd'hui, six décennies plus tard, les conclusions momentanées auxquelles l'écrivain adossait son travail sont dépassées, la grotte de Lascaux elle-même, si elle le fut jamais sérieusement, a cessé d'être reconnue comme le lieu de l'enfance de l'art, et l'étude de Bataille, quelle que soit sa valeur historique, risque fort de passer pour un texte daté. Ce qui la sauve pourtant de la péremption est cela même par quoi elle sublimait déjà les hypothèses scientifiques de son temps : son caractère spéculatif, sa hardiesse philosophique, le brio et la verve de sa célébration de l'art. Lascaux, en ce sens, est bien une oeuvre de Bataille, sans laquelle ses autres oeuvres ne peuvent être entièrement comprises. Lorsqu'il assimile les figures de la grotte aux premières manifestations d'un « rire » proprement humain, à une « fête », à une « transgression » ponctuelle des « interdits » primordiaux et solidaires de la mort et de la sexualité, nul doute que ces développements n'excèdent, n'aient excédé d'emblée le cas spécifique de Lascaux.
Sa pérennité, cet ouvrage le doit aussi et enfin à la somptuosité de l'édition originale de Skira, dont on ne sait trop si c'est elle qui le magnifie ou lui qui se met à son service. En reprenant le texte de Bataille et les photographies originales - qui surent, dès 1955, rendre justice à la beauté de Lascaux dans ses nuances et sa totalité -, L'Atelier contemporain réédite également un geste éditorial d'une élégance rare. -
Poèmes et nouvelles érotiques
Georges Bataille
- Mercure de France
- Le Petit Mercure
- 3 Novembre 2022
- 9782715260672
«Toute la mise en oeuvre de l'érotisme a pour fin d'atteindre l'être au plus intime, là où le coeur manque.»Georges Bataille.
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Georges Bataille avait un grand projet : élaborer, à partir d'une critique de l'utile, une économie générale qui désaliène l'homme rivé au travail et restitue sa « part maudite » - la consumation, libre, gratuite.
Il fait l'hypothèse d'un temps originaire où le monde se serait donné à l'homme dans un pur rapport d'immanence et d'immédiateté. Le monde était alors l'intime de l'homme, il était excès, il était passion : « Le monde intime s'oppose au monde réel comme la démesure à la mesure, la folie à la raison, l'ivresse à la lucidité ».
Désormais, dans le monde transcendant - ce monde où l'homme rivé au travail s'invente des fins hors de lui et à atteindre dans l'avenir - l'érotisme permet de redécouvrir la possibilité de dépenses d'énergie sans cette utilité immédiate qui nous asservit. L'érotisme enfièvre, dépense, gaspille. Puisque sur lui seul l'avenir n'a pas de prise, il est « la voie la plus puissante pour entrer dans l'instant ».
Cet ouvrage est extrait du tome VIII des OEuvres complètes de Georges Bataille.
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Romans et récits
Georges Bataille
- Gallimard
- Bibliotheque De La Pleiade
- 18 Novembre 2004
- 9782070115983
Rassembler, pour la première fois, les oeuvres narratives de Bataille en un volume, c'est leur donner une nouvelle chance d'exercer toute leur force - de scandale, de libération, de désorientation. Mais ranger, avec ce que cela suppose d'ordre et de clarté, les écrits de Bataille dans des catégories «conventionnelles» n'est pas un exercice innocent. Ses textes échappent aux genres traditionnels. Bataille, pourtant, emploie lui-même ces termes, roman, récit, et il s'interroge en ouverture du Bleu du ciel sur «ce qu'un roman peut être». Il y définit la fiction par ses fonctions : exprimer la rage de l'auteur, faire franchir au lecteur les «limites imposées par les conventions», dire l'excès, provoquer la transe. Chaque roman, chaque récit de Bataille est «un don de fièvre» (Ma mère). Ces romans et récits - érotiques, bien sûr, mais «il n'y a pas de mur entre érotisme et mystique» (Sur Nietzsche) -, sont ici «au complet». Quand il existe plusieurs versions d'une même oeuvre, on trouve en appendice au texte définitif la version originelle : notamment celle de l'Histoire de l'oeil publiée en 1928, ou celle, manuscrite et inédite, du Bleu du ciel de 1935. Le projet Divinus Deus, vaste ensemble inachevé, a été réexaminé. Au corpus, enfin, s'ajoutent trois récits de jeunesse inédits. Et les illustrations d'André Masson, Pierre Klossowski et Hans Bellmer sont reproduites dans le texte lui-même, ou dans ses appendices.
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La mutilation sacrificielle et l'oreille coupée de Vincent Van Gogh
Georges Bataille
- Éditions Allia
- Petite Collection
- 7 Janvier 2021
- 9791030413502
«Il est permis de douter que même les plus furieux de ceux qui se sont jamais déchirés et mutilés au milieu des cris et des coups de tambour aient abusé de cette merveilleuse liberté autant que l'a fait Vincent Van Gogh : allant porter l'oreille qu'il venait de trancher précisément dans le lieu qui répugne le plus à la bonne société. Il est admirable qu'il ait ainsi à la fois témoigné d'un amour qui ne tenait compte de rien et en quelque sorte craché à la figure de tous ceux qui gardent de la vie qu'ils ont reçue l'idée élevée, officielle, que l'on connaît.» À l'origine de ce bref essai rédigé en 1930, un fait divers : au Père-Lachaise, un certain Gaston F., après avoir fixé le soleil, «reçut de ses rayons l'ordre impératif de se trancher un doigt». Ce qu'il fit, avec les dents. À partir de ce cas, Bataille étudie le geste de Van Gogh se tranchant l'oreille, qu'il éclaire par l'analyse de son oeuvre et par la comparaison avec les rituels sacrificiels d'automutilation dans les sociétés primitives. Ce faisant, il élabore une réflexion sur le sens du sacrifice dans nos sociétés modernes, considéré comme l'action qui peut rompre l'homogénéité habituelle de la personne, imposée par la société. Au-delà de la réflexion sur l'oeuvre et la vie de Van Gogh, qui préfigure le texte d'Antonin Artaud, Van Gogh, le suicidé de la société, on retrouve dans cet essai certains des thèmes fondamentaux de l'oeuvre de Bataille.
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Manet ne cria pas, ne voulut pas s'enfler : il chercha dans un véritable marasme : rien ni personne ne pouvait l'aider. Dans cette recherche, seul un tourment impersonnel le guida. Ce tourment n'était pas celui du peintre isolément?: même les rieurs, sans le comprendre, attendaient ces figures qui les révulsaient mais qui plus tard empliraient ce vide qui s'ouvrait en eux. Manet, accoucheur «?impersonnel?» de l'art moderne?? Paru pour la première fois chez Skira en 1955, ce Manet-là - comme l'analyse utilement la préface de Françoise Cachin à la réédition de 1983 - est celui de Georges Bataille - et donc une oeuvre en prise directe sur les débats esthétiques de son temps, dont elle parle aussi le langage. C'est ce qui lui confère sa singularité impérissable, ainsi que sa portée historique. Le Manet de Bataille est presque un personnage. Personnage littéraire d'abord, ami des plus grands poètes et écrivains de son temps, Baudelaire, Zola, Mallarmé, qui tous lui ont écrit ou ont écrit sur lui. C'est à ces sources privilégiées que s'abreuve Bataille pour dépeindre un Manet déjà romanesque, quoique falot?: «?un homme du monde, à vrai dire en marge du monde, en un sens insignifiant?», «?au-dedans, rongé par une fièvre créatrice qui exigeait la poésie, au-dehors railleur et superficiel?», «?un homme entre autres en somme, mais charmant, vulgaire... à peine.?» Manet utilité, donc - mais en même temps nécessité de l'histoire de l'art, «?instrument de hasard d'une sorte de métamorphose?», homme par qui le scandale arrive bien malgré lui, initiateur innocent de la «?destruction du sujet?»?: «?c'est expressément à Manet que nous devons attribuer d'abord la naissance de cette peinture sans autre signification que l'art de peindre qu'est la «peinture moderne»... C'est de Manet que date le refus de «toute valeur étrangère à la peinture».?» C'est alors en continuateur des grandes exégèses de Valéry et surtout de Malraux que Bataille s'exprime. Là où il est tout entier lui-même, et inimitable, c'est dans les intuitions par lesquelles il traverse l'oeuvre du peintre comme la foudre, appuyant sa vision sur une sélection de tableaux qu'il légende avec brio. À supposer que ce Manet ne soit pas le vrai, il n'en possède pas moins sa valeur propre.
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L'archangélique et autres poèmes
Georges Bataille
- Gallimard
- Poesie Gallimard
- 15 Mai 2008
- 9782070349814
« L'oeuvre poétique de Georges Bataille est restée à l'écart, non parce qu'elle manquerait de qualité, mais plus certainement parce qu'elle représente un danger pour la poésie. Elle n'en conteste pas seulement les manières, elle les déchire, les salit ou bien les rend dérisoires. Ainsi la poésie est attaquée dans sa nature même et bientôt pervertie ou, plus exactement, souillée. On se protège de cette souillure mentale en l'attribuant aux sujets souvent obscènes ou scatologiques, alors qu'il s'agit d'une chose tout autre - qu'il s'agit d'un saccage interne faussant les articulations ordinaires du poème pour leur faire desservir leur propre élan. Il y a de la brutalité dans ce retournement : une façon de trousser le vers pour exhiber sa nudité sonore scandée à contresens de ce qu'il dit. » Bernard Noël.
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Somme athéologique Tome 2 ; le coupable / l'alleluiah
Georges Bataille
- Gallimard
- L'imaginaire
- 5 Mars 1998
- 9782070404957
Le Coupable est le récit d'une expérience «mystique» paradoxale, formé à partir des pages d'un journal rédigé de 1939 à l'été de 1943. Cette expérience, en dépit des apparences troublées par les événements, n'appartient pas à une religion définie. Paradoxale, elle ne s'oppose nullement à l'érotisme : elle se joue néanmoins dans l'extase ; immorale, elle n'a d'autre possibilité que la chance. C'est une sorte de jeu sans refuge, égarement, angoisse au départ, essentiellement violence rentrée. Au Coupable est joint L'Alleluiah, invitation brûlante à l'érotisme de l'amant à l'amante.
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Bataille hardi, Bataille novateur, Bataille éloquent. Où classer Georges Bataille ? Sartre et Malraux furent fascinés par les excès de ce « mystique sans dieu ». Rédigée en 1948, cette Théorie de la religion nous plonge, entre Éros et Thanatos, dans l'univers paradoxal d'un philosophe-artiste pour qui un concept vaut un cri.
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Contre-Attaque : Union de lutte des intellectuels révolutionnaires
Georges Bataille, André Breton, Michel Surya
- Ypsilon Éditeur
- 12 Mars 2013
- 9782356540270
L'importance de Contre-Attaque, dont l'existence fut courte, tient à la personne de ses deux animateurs Georges Bataille et André Breton. Dernier sursaut public de Bataille, après sa participation au Cercle Communiste Démocratique, avant d'abandonner l'idée d'action sinon purement littéraire ; première prise de position politique de Breton après la rupture avec le P.C.F. Cette union très hétérogène d'intellectuels révolutionnaires produit un discours intempestif et circonstancié qui frappe par sa violente lucidité et son actualité. L'unique numéro des Cahiers de « Contre-Attaque » et tous les documents produits dans cette courte période - déclarations, tracts, interventions - sont réunis, pour la 1re fois, dans ce volume.
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« [.] il est nécessaire à la vie de se tenir à hauteur de la mort », écrit Bataille dans La Limite de l'utile.
Commandement où se lit certes l'influence persistante de Hegel sur lui et le projet d'une histoire universelle qui portera bientôt le titre de La Part maudite ; commandement que Bataille déshégélianise cependant aussitôt en apportant cette précision : « Une communauté ne peut durer qu'au degré d'intensité de la mort, elle se décompose dès qu'elle manque à la grandeur particulière au danger. » Par quoi l'on voit que la question, dès lors, n'est pas pour lui qu'ontologique, mais sociologique aussi, et économique.
Certainement, l'une des singularités les plus grandes de son génie se mesure-t-elle au fait d'avoir su, durant les mêmes années du début de la guerre, mener de front l'écriture de L'Expérience intérieure et du Coupable, livres d'une expérience authentiquement intérieure, et celle de La Limite de l'utile, où l'expérience qui est entreprise est celle de l'universalité des formes de l'histoire.
Première version abandonnée de La Part maudite, La Limite de l'utile est aussi la seconde de « La Notion de dépense », écrit dix ans plus tôt. Mathilde Girard, qui postface cette édition, a raison d'y insister : il faut ne pas davantage séparer entre les textes qu'entre les expériences, il faut au contraire associer La Part maudite et La Limite de l'utile à L'Expérience intérieure, au Coupable, à la Méthode de méditation, rédigés dans les mêmes années. Ne pas les séparer pour mesurer que la recherche qui les soutient veut être menée par un fou, un saint (c'est ainsi que Bataille entend s'emparer des conclusions de la science). La proposition de l'économie générale est impossible mais elle est seule à pouvoir soutenir l'expérience d'une connaissance liée à la perte de sens. La Limite de l'utile serait ainsi la version souveraine de La Part maudite - son revers, son ombre. Les arguments sont là, la généalogie de la gloire, de sa déchéance, mais comme portés par rien - rendus inutiles exactement.
À cet endroit, cette « version abandonnée » de La Part maudite fait ressusciter un appel, une exigence, qui sont autant ceux d'une économie qui ne mépriserait pas la vie (jusque dans la mort), que d'une pensée qui contredit la promesse de toute consolation dans la spéculation capitaliste. Se soustraire à l'utilité - des activités, de la pensée - est un processus infini que commande une écriture infinie qui attend d'être communiquée.
Mathilde Girard : « À quoi reconnaît-on aujourd'hui une conduite glorieuse - une conduite glorieuse humainement, c'est-à-dire qui n'attendrait ni de l'au-delà ni de l'argent les bénéfices de sa dépense ? Cela se peut-il encore que des êtres, des groupes ou des communautés s'entendent à ne rien vouloir gagner - à pouvoir perdre ?
Avec la «notion de dépense», Georges Bataille nous parle de quelque chose qui n'a peut-être jamais existé et qui s'éloigne toujours davantage de l'horizon de notre économie. Ce n'est pas que le capitalisme ne sache pas gaspiller et détruire, c'est qu'il a depuis longtemps dépassé ses capacités réelles - il les a même troquées pour une activité imaginaire (une spéculation) qui a le pouvoir de faire apparaître de nouveaux territoires à coloniser. Il se passe de nous.
Ce qui brille, alors, et qui nous attire, qu'est-ce que c'est ?
Bataille répondra : ce n'est rien. »
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Lettre à René Char sur les incompatibilités de l'écrivain
Georges Bataille
- Fata Morgana
- 11 Septembre 2019
- 9782377920532
René Char pose, en mai 1950 dans la revue Empédocle, cette question infiniment ouverte : «Y a-t-il des incompatibilités ?». Il la pose à la cantonade, mais s'adressant à des écrivains et à des intellectuels à qui il laisse le soin de l'orienter selon leur propre questionnement. La réponse de Georges Bataille, gage d'une estime et d'une amitié sincères, est des plus ambitieuses et aborde le problème de l'action opposée au langage, celui du langage comme mode de l'action et entraîne l'écrivain vers une remise en cause de sa position : «Y a-t-il des incompatibilités entre l'écriture et l'engagement ?» Ce questionnement, à une époque où la position sartrienne pèse de tout son poids, entraîne Bataille dans la dissection minutieuse d'un monde en pleine déconstruction et des rapports de l'intellectuel au pouvoir, questions plus actuelles que jamais.