« Pieds nus, vêtu d'un sampot et d'une veste de toile, le visage entouré d'une longue barbe et à l'abri sous un large chapeau, ainsi apparaît Auguste Pavie, explorateur et diplomate.
À pied, en charrettes à boeufs, en pirogue ou à dos d'éléphants, seul ou avec quelques compagnons fidèles, Pavie va sillonner pendant des années le Cambodge et le Laos. Il est l'exemple d'une carrière fulgurante comme les colonies pouvaient le permettre alors. Simple commis des télégraphes en 1869, vice-consul à Luang Prabang au Laos en 1885, il finit ministre plénipotentiaire en 1896, commandeur de la Légion d'honneur. Quand Pavie arrive en Indochine, cela fait à peine dix ans que la France y a pris pied. En 1895, quand il regagne la métropole, grâce à lui les territoires laotiens font partie de l'Indochine française. En quelques années, il a repoussé les prétentions siamoises sur une partie du Laos au mépris des fièvres et du danger, rallié les Pavillons noirs, pirates assassins de Francis Garnier et du commandant Rivière qui dévastaient le nord du Tonkin, fait du grand seigneur thaï Deo van Tri un ami fidèle de la France. On retiendra aussi de Pavie sa grande humilité et son humanité, son extraordinaire facilité à entrer en contact avec les populations. À l'heure où les débats suscités par la colonisation peuvent être encore violents, il est intéressant de se pencher sur un personnage complètement oublié, sur ce « grand humain de l'Indochine », « ce vainqueur aux pieds nus » ainsi que le nomme un de ses biographes, sur cet homme qui est un des rares à pouvoir dire : « Je connus la joie d'être aimé des peuples chez qui je passai. » Pavie nous transporte dans une Indochine authentique, au Laos, royaume du million d'éléphants et du parasol blanc, à Luang Prabang, cité du Bouddha d'or et du flamboyant, sur le Mékong, fleuve mythique, qui après lui ont attiré voyageurs et artistes comme Jean Bouchaud et André Maire.
Parmi plus de 140 000 photographies provenant des anciennes colonies et de l'Algérie, les Archives nationales d'outre-mer ont choisi de montrer quelques-unes d'entre elles consacrées aux femmes de ces pays lointains.
Ce choix a été guidé par la fascination que ces femmes "d'ailleurs", jusque-là inconnues, ont exercée sur des voyageurs peu préparés à ce contact. Par ces clichés parvenus jusqu'à nous, ils nous restituent leurs émotions, leurs curiosités. Et le regard de ces femmes nous dérange autant qu'il nous subjugue.