Ce livre, qui a déjà fait l'objet de quinze éditions en Italie, trace un profil complètement nouveau de l'histoire du droit romain. L'expérience juridique n'apparaît pas divisée, selon un schéma habituel, en secteurs qui peinent parfois à trouver un point de rencontre : le droit public et privé, le droit pénal, les « sources » de production et de compréhension normative, le procès; mais elle est étudiée dans ses structures fondamentales et dans les « valeurs » qui la guident, dans sa constitution et ses mutations, des Douze Tables jusqu'à la codification justinienne. Terminus d'un long parcours, la codification justinienne prend place entre un passé et un futur; elle clôt une histoire du droit romain, mais est également à la base de la culture juridique byzantine comme de celle de l'Europe médiévale et moderne.
Traduit de litalien par Luigi-Alberto Sanchi (CNRS).
Le droit est une forme d'ordonnancement social qui a envahi la modernité, dont il est rapidement devenu une bannière. Et c'est une forme inventée par les Romains.
Aldo Schiavone reconstruit ce processus fondateur complexe, dont il suit la trace à travers les siècles, des origines les plus reculées jusqu'au seuil du monde tardo-antique. Le résultat est une vasque fresque historique et un essai rigoureux d'interprétation sur les traits fondamentaux de la machine juridique occidentale, et du discours qui s'est construit autour d'elle : le formalisme, la prétendue neutralité, les rapports avec le pouvoir politique. Milieux, personnages, cadres conceptuels, idéologies ayant marqué notre histoire sont analysés en un contrepoint constant entre antique et moderne, entre pensée romaine et tradition européenne.
?Comment fédérer des milliers de cités provenant d'horizons juridiques et culturels différents en un ensemble cohérent et efficace, sans que tout sombre dans le chaos ou la tyrannie ? C'est le problème qu'a dû affronter la cité de Rome, une fois conquise une grande partie du monde occidental. Par leur créativité incessante, les juristes romains ont petit à petit conçu un droit civil qui intégrait des éléments étrangers, tout en les qualifiant de romains. Créant une homogénéité à partir de l'hétérogénéité, ce travail séculaire a abouti, en 212 de notre ère, à la Constitution Antonine par laquelle l'empereur Caracalla a accordé la citoyenneté romaine à tous les hommes libres du monde romain. Déconstruisant bon nombre d'opinions modernes concernant Rome, la République et l'Empire, ce livre retrace cette aventure intellectuelle et politique extraordinaire, qui n'est pas sans rappeler certaines questions contemporaines issues de la mondialisation. Professeur à l'Université de Chicago, Clifford Ando est historien du droit et de la religion romaine. Il a récemment publié The Matter of the Gods : Religion and the Roman Empire (2009) et Imperial Roma : The Critical Century (2012). Le présent ouvrage est issu de conférences qu'il a données au Collège de France, en mars 2010.
André Alciat (1492-1550), fondateur de l'humanisme juridique, est aussi, par ses Emblemata (publiés en latin pour la première fois en 1531 à Augsbourg avec les illustrations de Jorg Breu, réédités enrichis à diverses reprises et traduits en diverses langues jusqu'à la mort de l'auteur), le protos eurétès d'un genre fondé sur l'association dans la page d'un titre, d'une épigramme et d'une image. Ce genre a joui pendant plusieurs siècles d'une fortune considérable dans toute l'Europe et a mobilisé depuis des décennies les travaux de nombreux savants réunis dans une Société internationale.
Il est donc étonnant que jusqu'à présent on n'ait pu lire cet ouvrage fondateur dans sa forme définitive (les deux-cents onze épigrammes qui en composent le full stream) dans aucune édition moderne, et à plus forte raison traduite et annotée : l'édition avec traduction italienne de Maria Antonietta de Angelis (Salerne, 1984) est fondée sur l'édition Steyner de 1531 (104 emblèmes), celle de Mino Gabriele (Milan, 2009), avec traduction italienne également, ne prend en compte que les éditions de 1531 et 1534. Pierre Laurens a publié en 1997, en fac-simile, l'édition complète en se basant sur l'édition lyonnaise Macé-Bonhomme de 1551 (les 211 emblèmes classés par lieux communs, intégrant notamment les 86 nouveaux emblèmes de l'édition aldine de 1546 et illustrés par les vignettes de Pierre Vase) précédée d'une solide préface et pour la première fois suivie d'une concordance entre les différentes éditions, mais elle ne comportait toutefois ni traduction ni annotation. C'est cette lacune (qui ne l'a pas empêchée d'être regardée jusqu'à aujourd'hui comme l'édition de référence), que la présente publication entend remédier.
À la préface originelle de Pierre Laurens, mise à jour et sensiblement enrichie par la discussion des contributions postérieures à 1997, s'ajoute désormais, et pour la première fois dans notre langue depuis le XVI e siècle, une traduction inédite. Pierre Laurens a choisi de rendre justice à ce texte poétique en procurant des épigrammes une version française rythmée et suivie vers à vers. Rédigée par Florence Vuilleumier-Laurens, l'annotation, qui fait une place aux problèmes textuels, éclaire à l'intention du lecteur les principales difficultés historiques ou érudites, mais est essentiellement centrée sur l'identification des sources, certaines connues de longue date grâce aux grands commentaires latins de Mignault, Sanchez, Thuyllius, et d'autres (notamment les sources relevant de l'épigraphie et de la numismatique) fruit de la recherche récente dont les deux auteurs ont pris largement leur part.
L'enseignement du droit et la reproduction des hiérarchies est une critique mordante, pamphlétaire et nécessaire de l'enseignement du droit aux Etats-Unis. D'abord lu par ceux qui souhaitaient foire une place à la pensée critique dans l'enseignement du droit, ce texte est aujourd'hui l'un des plus cités tout au cours de la formation des avocats. Il a influencé une génération d'étudiants et de professeurs aux Etats-Unis et au Canada. Duncan Kennedy, professeur de droit à l'université Harvard, affirme que l'enseignement du droit participe aux inégalités dans nos sociétés, qu'elles soient dues aux classes sociales, à la race ou au sexe. La pierre angulaire de son raisonnement : les idéaux moraux justifiant les jugements ne dévoilent leur véritable signification qu'à la lumière des intérêts de ceux qui les défendent. Or les facultés de droit sont sous l'emprise des privilégiés de notre société. Elles font donc plus qu'enseigner les règles du droit et ses idéaux de justice. Elles inculquent des habitudes, des manières de penser et d'agir, autant de signes distinctifs qui permettront aux jeunes juristes de s'intégrer au sommet de la hiérarchie sociale et d'en assurer la reproduction à l'identique.