Par une décision orale du 28 janvier 2009, aussitôt suivie par les autres chambres, la Chambre de première instance I de la Cour pénale internationale ordonnait, dans l'affaire Lubanga, l'assignation d'un conseil à tous les témoins susceptibles d'auto-incrimination. Il s'agissait d'anciens suspects devenus alliés du Procureur en vertu d'un accord conclu dans la phase de l'enquête en application de l'article 54-3-d du Statut de Rome. Les juges instituaient ainsi, ultra legem, un nouvel acteur du procès pénal international.
Grand oublié des textes fondamentaux de la Cour, absent des manuels de droit international pénal, ce « témoin assisté » à statut hybride (mi-témoin, mi-suspect) apparaît comme un acteur atypique du procès pénal international. En huit ans d'existence, il a saisi les chambres des procédures inédites telles que celles relatives à la reconnaissance du droit d'asile et du droit à la liberté des témoins détenus. Ces procédures particulières, dites « détachables » de la procédure principale, ont donné lieu à une abondante jurisprudence, souvent contradictoire, notamment sur l'appelabilité des décisions rendues en la matière.
L'institution prétorienne du témoin assisté aura ainsi permis à la Cour de revisiter des notions classiques du droit international pénal, dont celles de partie et de témoin. Son impact sur la procédure pénale internationale a été tel qu'une révision des textes fondamentaux de la Cour s'impose pour déterminer l'étendue de ses droits et obligations sur lesquels les chambres restent encore profondément divisées.
L'européanisation du droit pénal est l'un des phénomènes les plus marquants de cette matière.
Largement influencé par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme, le droit pénal rencontre aujourd'hui de plus en plus souvent le droit de l'Union européenne. Le juge interne est le témoin privilégié mais également un acteur essentiel de ce mouvement rapide et complexe qui marque certainement une étape importante de transformation de la matière. L'articulation des normes n'est pas toujours simple ; que faire, par exemple, lorsque la mise en oeuvre d'un mécanisme issu de l'Union européenne, tel le mandat d'arrêt européen, heurte un droit fondamental garantit par la Convention européenne des droits de l'homme ?
Les actes du présent colloque, co-organisé par la Cour de cassation et l'IRDEIC de l'Université Toulouse I Capitole, restituent les réflexions, à la fois, de magistrats et d'universitaires à propos de questions significatives nées de cette européanisation. Les principes de légalité, de proportionnalité et de reconnaissance mutuelle font l'objet de ce regard croisé, ainsi que des thèmes tels que la garde à vue, le droit pénal financier et le principe non bis in idem qui permettent de constater la mise en oeuvre du droit pénal européen par la Chambre criminelle.
Sous la direction scientifique de Didier Guérin et Bertrand de Lamy.
Au cours des 25 dernières années, lorsque les présidents latino-américains au pouvoir ont aspiré à se faire réélire, ils y sont toujours arrivés à moins que leur pays ne connaisse une débâcle économique. Entre 1994 et 2018, dans les 18 démocraties qui composent l'ensemble appelé « Amérique latine », il y a eu 22 tentatives de réélection présidentielle immédiate dont 21 furent couronnées de succès. La seule exception à cette tendance électorale s'est présentée en République Dominicaine en 2004, lorsque le président HIPÓLITO MEJÍA a perdu la réélection car son pays était plongé dans une profonde crise économique. L'interprétation de ces données indique que l'autorisation de la réélection présidentielle consécutive a annulé dans la région la compétitivité électorale, qui est une des conditions fondamentales pour que la démocratie puisse exister. En construisant une base de données intégrant les résultats des élections présidentielles qui se sont tenues en Amérique latine entre 1953 et 2018 (162 observations), nous avons évalué l'impact causal de l'autorisation de la réélection présidentielle immédiate, ainsi qu'une autre série de variables politiques et économiques, sur le résultat des élections. L'analyse statistique inférentielle fournit de solides preuves que la réélection détériore la qualité démocratique et que le bon état de l'économie accentue la différence avec laquelle le scrutin est remporté (théorie du vote économique). La principale cause de ce phénomène antidémocratique est l'abus du pouvoir présidentiel à des fins électorales, qui fait du chef d'État qui aspire à être réélu un candidat invincible à cause des ressources exorbitantes dont il dispose pour manipuler le résultat des élections. On peut en outre constater une corrélation entre autorisation de la réélection présidentielle immédiate et détérioration progressive de la qualité de la démocratie au cours des deuxièmes et troisièmes mandats du même président, selon le « Electoral Democracy Index ». En définitive, la réélection présidentielle immédiate en Amérique Latine constitue un poison pour la démocratie qu'il convient de proscrire de manière renforcée dans les textes constitutionnels, par le biais de clauses immuables qui puissent garantir l'alternance dans l'exercice du pouvoir présidentiel.
L'évitement de la norme envahit tous les domaines du droit. Dans certaines situations, cet évitement est parfaitement licite et constitue une simple opportunité offerte au justiciable qui se trouve confronté à un vide juridique ou à un choix entre plusieurs normes. Dans d'autres situations, l'évitement franchit la frontière de l'illicite et doit alors être prévenu ou sanctionné. Tentaculaire, l'évitement de la norme ne se laisse pas facilement appréhender. Le juriste se trouve confronté à la variété des types d'évitement (contournement, optimisation, évasion), à la diversité des cadres de l'évitement (interne, international, européen) et à la multiplicité des domaines de l'évitement (droit de l'arbitrage, droit du numérique, droit de la responsabilité, droit du travail, droit de l'environnement). Que signifie exactement l'évitement de la norme ? Pourquoi éviter ? Comment éviter ? Et une fois l'évitement précisé, quels remèdes peuvent être apportés ? Ces remèdes sont-ils efficaces ? Ce sont les réponses à ces questions que le présent ouvrage tente de mettre en lumière.
Soixante-dix ans après l'adoption de la Déclaration universelle des droits de l'homme, la question de la dialectique universalité/spécificité des droits de l'homme demeure un sujet crucial. Comment concilier en effet le dogme de l'universalité avec une approche pluraliste de la réalisation des droits de l'homme ? L'objet du présent ouvrage, issu d'un colloque qui s'est tenu à l'Université de Montpellier les 25 et 26 octobre 2018 sous l'égide de l'IDEDH (Institut de droit européen des droits de l'homme EA 3976), est de porter la réflexion sur cette tension à travers l'exemple particulier de l'islam en droit international des droits de l'homme. Partant d'une approche pluridisciplinaire et tentant de dépasser une approche manichéenne, l'ouvrage envisage d'un point de vue critique la compatibilité de « la loi islamique » avec le droit international des droits de l'homme. En trois temps, il examine la place des droits de l'homme en islam, le rôle de l'islam en droit international des droits de l'homme et l'islam dans le contentieux international des droits de l'homme. Peut-on parler d'un particularisme islamique en la matière ? Quelle est l'attitude des Etats arabo-musulmans face aux traités internationaux de protection des droits de l'homme ? Comment les juges, internes et internationaux, appréhendent les litiges dans lesquels sont en cause des mécanismes, des pratiques, issus de la Charia ? Telles sont quelques-unes des questions auxquelles les contributions, ici réunies, s'essayent de répondre. Réunissant des spécialistes éminents, universitaires, membres d'organes internationaux et régionaux de protection des droits de l'homme, l'ouvrage explore un sujet qui n'a pas encore fait l'objet en langue française d'une analyse d'ensemble.
Deux décennies après la conclusion du Traité de Rome portant Statut de la Cour pénale internationale, le présent colloque se propose, d'une part, de dresser le bilan et de dégager les perspectives de cette juridiction pénale internationale qui a suscité tant d'espoir et dont le but est de lutter contre l'impunité des auteurs de crimes internationaux afin de restaurer la dignité de la personne humaine. D'autre part, il contribuera à une meilleure connaissance de cette institution qui suscite des réactions contrastées parmi les États africains.
Le 25 juin 2014, Germain Katanga devenait la première personne à être définitivement condamnée par la Cour pénale internationale. Dans l'indifférence générale, ce Congolais élevé dans la forêt de l'Ituri voyait ainsi son sort scellé après sept années de procédures. Reconnu coupable de complicité résiduelle de la commission de crimes contre l'humanité et crimes de guerre dont on ne connut jamais les principaux auteurs, il le fut pour avoir fait transiter, sur ordre, des armes venues du ciel qui servirent à tuer soixante personnes lors d'une bataille à laquelle il ne participa pas. Il avait alors 24 ans.
À travers une déconstruction étape par étape du cheminement qui a amené cet homme de la chasse aux okapis à sa condamnation par la CPI, nous avons cherché à comprendre comment une institution créée pour juger les crimes les plus graves et ses principaux responsables a pu croiser le chemin d'un être humain qui n'avait auparavant jamais entendu parlé de « La Haye » et qui fut opportunément nommé général à 26 ans pour être immédiatement arrêté, puis transféré dans l'autre monde.
Dénuée de contrôle social, incapable de jouer le rôle qui lui a été attribué, la CPI s'est longtemps défaussée sur les États pour expliquer les échecs de sa première décennie d'exercice. La réalité est plus abrupte, et laisse apparaître en creux une incapacité structurelle à agir contre les intérêts de l'ordre étatique, et a fortiori des dominants de cet ordre étatique. Après avoir décortiqué le fonctionnement interne de l'institution, en nous appuyant sur notre propre expérience à la CPI et au ministère des Affaires étrangères français, nous avons donc tenté de lire la CPI depuis une perspective philosophique et hobbesienne. Partant d'enquêtes de terrain sur l'action de la Cour en Afrique, plus de cent entretiens avec les principaux protagonistes de l'institution et de l'affaire Katanga - dont le condamné, qui recevait avec nous sa première visite non familiale en sept ans - nous avons ainsi suivi un cheminement casuistique inversé, de la plus petite échelle de l'institution à sa remise en cause en tant qu'ensemble.
Le monde arabe, depuis 2011, fait l'objet de multiples mutations constitutionnelles. Ces nouveaux mouvements constitutionnels, même s'ils tendent à aller vers l'édification d'un État de droit possèdent, pour chaque pays, leurs propres spécificités. En effet, ces « révolutions arabes » ont, ou ont eu, un impact plus ou moins important sur les systèmes politiques en place. Cette table ronde s'est donnée comme objectifs non seulement de mettre en avant les transformations qui se déroulent actuellement mais également de mettre en lumière leurs limites. Les conférenciers se sont également efforcés d'étudier ces mouvements constitutionnels tout en ayant une démarche prospective. Il s'agissait non seulement de faire des constats, d'analyser la portée des évolutions constitutionnelles mais également de proposer des pistes éventuelles d'évolution dans le futur face aux enjeux qui se posent.
La justice transitionnelle est devenue une référence dans les pays qui tentent de faire face à un passé de violations massives et systématiques des droits de l'homme, en raison d'un régime autoritaire ou d'un conflit armé. La Colombie, ravagée par un conflit armé à caractère interne durant soixante ans, suit cette tendance. En 2005, une loi inspirée de la justice transitionnelle est adoptée. Pourtant, cette loi n'a pas été adoptée dans un contexte de sortie de conflit. Depuis son adoption, la justice transitionnelle est un sujet d'actualité dans la conjoncture colombienne. Que ce soit par le cadre normatif de 2005 ou par l'adoption de nouvelles dispositions, le système de transition colombien se développe peu à peu et fait l'objet de modifications importantes. L'analyse du système mène à établir une connexion avec les lois passées sur le conflit. L'étude globale de la législation colombienne sur le sujet offre une approche différente du modèle colombien. Dans cette perspective, l'utilisation de la justice transitionnelle est relativisée et le caractère du processus transitionnel est davantage favorisé. Il en résulte la construction progressive d'un système dans lequel l'emploi de la justice transitionnelle n'est pas encore épuisé. Le système transitionnel actuel en Colombie correspond à une législation de préparation pour le post-conflit. Cette perspective facilite le repérage des défaillances normatives et les obstacles à surmonter, pour mettre en oeuvre de façon efficace et efficiente un système transitionnel qui accompagnera les efforts afin de mettre fin au conflit armé et facilitera la phase post-conflictuelle.
L'étude du dossier de la procédure devant la Cour pénale internationale permet de mettre en lumière les subtilités du procès pénal international, traversé par des cultures juridiques et des techniques procédurales différentes, appartenant tantôt à la common law, tantôt à la civil law. Dénominateur commun à tous les systèmes ainsi qu'à toutes les procédures, le dossier est une notion encore méconnue, bien qu'elle soit une notion clé du système établi à Rome.
Le Statut de Rome du 17 juillet 1998, bien que portant création de la Cour pénale internationale (CPI), ne concerne pas le seul ordre juridique international mais aussi les ordres juridiques nationaux. En effet, outre qu'il consacre le principe selon lequel la CPI est complémentaire des juridictions pénales nationales, le Statut impose aux États parties une obligation générale de coopération. Les droits nationaux ont ainsi dû s'adapter à l'institution de la CPI. En France, deux lois ont été spécialement votées à cette fin : la loi no 2002-268 du 26 février 2002 relative à la coopération avec la CPI et, plus importante et plus connue, la loi no 2010-930 du 10 août 2010 portant adaptation du droit pénal français à l'institution de la CPI.
Cet ouvrage a précisément pour objet de faire un bilan de cette adaptation, en forme de « rapport d'étape », en s'attachant essentiellement aux conditions de mise en oeuvre de la compétence universelle - induite par le principe de complémentarité - et à la compatibilité du droit pénal (général et spécial) français avec les dispositions du Statut de Rome.
Des diverses communications présentées et des échanges intervenus lors de ces journées, il ressort que le processus d'adaptation, s'il est bien avancé, n'est pas achevé. Outre de probables interventions du législateur, la chambre criminelle de la Cour de cassation sera vraisemblablement, demain, amenée à apporter sa contribution, le tout sous le regard critique d'une doctrine plus que jamais utile dans l'exploration de ce nouveau continent que constitue le système de justice pénale internationale.
S'il existe plusieurs définitions de la notion de démocratie, toutes rejoignent la formule d'Abraham Lincoln selon laquelle elle est « le gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». Il existe cependant plusieurs variantes de mise en oeuvre de ce régime politique et la démocratie représentative peut, elle aussi, présenter différentes formes. Or, la promotion de l'une ou d'une autre révèle certains choix idéologiques qu'il s'agira de dévoiler. Il s'agira ensuite de s'interroger sur la finalité de ce recours. Dans la mesure où la théorie de l'État de droit implique une substitution du droit à la loi en tant que garantie contre l'arbitraire, le rôle du juge en ressort renforcé. Fort de cette légitimité, ne risque-t-il pas d'utiliser la notion de démocratie de façon à la circonscrire et à la soumettre à celle d'État de droit ? Ce panorama de l'utilisation de la notion de démocratie par différentes juridictions permettra aussi de mettre en lumière ce risque et sa réalité.
Nous nous proposons de mettre en évidence le processus sociopolitique de construction d'une industrie cinématographique et audiovisuelle européenne en abordant la question par l'entrée des financements européens que sont MEDIA et Eurimages. En effet, ces derniers ont été une opportunité pour la création et l'implémentation d'une politique culturelle cinématographique. Cette recherche fait apparaître un cinéma européen pouvant se définir comme un conglomérat de nationalités européennes, dont les points forts sont justement la diversité culturelle, linguistique et esthétique, reconnue en dehors même du territoire européen.
À travers le cinéma et l'audiovisuel, l'Union Européenne se dote d'un imaginaire et d'une identité véhiculés à l'écran. Derrière le champ du cinéma et de l'audiovisuel se cache en réalité un enjeu d'une tout autre envergure : l'identité européenne, qui se fonde sur sa diversité, faite d'exceptions culturelles additionnées.
Nous démontrerons que l'Europe finance la méthodologie de projet et la « technique » pour atteindre un but ultime : la création d'une cohésion européenne et par conséquent, une identité, à travers le vecteur de l'imaginaire le plus puissant qu'est le cinéma. Réalisée de manière subversive, cette politique permet une adhésion de l'ensemble des pays qui conservent leurs prérogatives culturelles, tout en protégeant l'Europe de la standardisation.
Appréhendée aussi comme un idéal, l'égalité se décline juridiquement à travers le principe de non-discrimination. Étudié par le prisme du droit européen, il se révèle être un exemple significatif des difficultés mais aussi des potentialités des relations entre les deux principaux espaces juridiques européens : le Conseil de l'Europe et l¹Union européenne. La Cour européenne des droits de l¹Homme, le Comité européen des droits sociaux ainsi que la Cour de justice de l'Union européenne affichent une apparente homogénéité derrière laquelle se cachent des réalités différentes qui fragilisent le principe de non-discrimination et affaiblissent son rôle pourtant central dans le renforcement du droit européen des droits de l¹Homme. Ce principe doit ainsi être redéfini afin de retrouver une pleine efficacité en tenant compte du fait que son interprétation ne peut différer d'un espace européen à l'autre. Ce défi majeur conduit à analyser en quoi consiste précisément, pour l'Europe, le caractère axiologique du principe de non-discrimination.
Cette thèse dégage, à partir de l'étude des mutations du droit constitutionnel thaïlandais et des doctrines qui le sous-tendent, le point cardinal de l'ordre politique thaïlandais, identifié comme étant la souveraineté du roi.
La construction de la souveraineté monarchique s'est appuyée sur des emprunts étrangers formant, par sédimentations successives, une doctrine proprement thaïlandaise du pouvoir royal l'érigeant en constituant suprême, seul interprète du dharma et de la coutume, auxquels le droit positif serait par nature inféodé.
L'articulation de principes constitutionnels modernes empruntés tant à l'Orient qu'à l'Occident avec les traditions hindoues et bouddhistes a permis au roi thaïlandais, par le recours à la notion de coutume constitutionnelle, de confier à la Cour constitutionnelle la mission de sauvegarde de la souveraineté royale.
Cette thèse a obtenu le prix Calmann-Lévy en Droit et Sciences Politiques de la Chancellerie des Universités de Paris.
Résultat d'un travail de comparaison entre le droit de la Cour pénale internationale et le droit français sur le crime de génocide, l'analyse est construite autour de deux axes : le premier est relatif aux fondements de l'incrimination du génocide, le second au champ de la répression du génocide, la thèse visant ainsi à la détermination d'un concept juridique idéal de génocide. L'étude des fondements de l'incrimination, d'abord, révèle que la prohibition du génocide ne peut être envisagée qu'en référence à un souci de protection des minorités contre une entreprise de destruction de ces groupes prenant la forme d'un projet collectif. Si le droit international, dans une optique collectiviste, place la protection des minorités au coeur de la valeur protégée par l'interdit du génocide, le Statut de Rome ne fait pas du projet collectif de destruction un élément nécessaire au crime de génocide, mais maintient l'exigence d'une intention individuelle de détruire, en tout ou partie, un tel groupe. À l'inverse, le droit français érige la notion de plan concerté en composante de l'infraction de génocide, mais n'envisage pas l'interdit du génocide comme un instrument de préservation des minorités, concevant celui-ci, dans une optique exclusivement individualiste, comme un moyen de protection de l'humanité de l'homme. Il est donc proposé de réaliser une sorte de fusion des deux systèmes. L'étude du champ de la répression, ensuite, conduit à préconiser, comme élément moral de l'infraction de génocide, la volonté chez l'accusé d'inscrire son comportement dans l'exécution du projet collectif de destruction d'un groupe. Il est également suggéré d'unir l'ensemble des infractions liées au crime principal de génocide (incitation au génocide, entente génocidaire) en subordonnant la constitution de ces infractions à l'existence d'un projet collectif de destruction d'un groupe minoritaire et à l'existence d'une volonté chez l'accusé de s'en faire l'agent, à l'image de l'infraction principale de génocide.
Les effets des accords de l'OMC dans l'ordre juridique de l'Union ont donné lieu à une jurisprudence abondante et à de nombreux travaux qui soulèvent des questions pratiques et fondamentales. En particulier, les conditions d'invocabilité, qui déterminent la faculté de se prévaloir d'une norme au soutien de ses prétentions, paraissent parfois mouvantes. De plus, les théories de la mondialisation du droit et du pluralisme juridique européen ou mondial proposent une analyse originale de l'influence de l'Union européenne sur l'émergence d'un droit mondial et appellent à un renouvellement de la pratique judiciaire dans ce contexte. La confrontation de ces théories au droit positif par l'étude des effets des accords de l'OMC devant les juges de l'Union et de ses États membres permet d'évaluer ces hypothèses doctrinales.
La fermeture de l'invocabilité de substitution et de réparation manifeste la prise en compte par ces juges de la résistance de l'Union à l'application du droit mondial du commerce. Cette solution est justifiée par les possibilités de négociations et de compensations qui assouplissent l'intensité normative des accords de l'OMC. Elle a permis le maintien ou l'élaboration de politiques européennes spécifiques. Dans ces conditions, le degré de résistance de l'Union à la mondialisation du droit dépend essentiellement de la volonté de ses organes politiques.
L'ouverture de l'invocabilité par incorporation et de l'invocabilité d'interprétation conforme révèle un rôle plus important des juges dans la participation de l'Union à la mondialisation du droit. Elle s'explique néanmoins par les nombreuses mesures de transposition et d'exécution des accords en droit de l'Union. D'une part, les juges de l'Union respectent l'appréciation politique de l'intérêt de l'Union en encadrant l'ouverture de l'invocabilité par incorporation. D'autre part, ils modifient exceptionnellement le contenu des droits nationaux et de l'Union en les rapprochant du droit mondial du commerce avec l'interprétation conforme. En dernière analyse, l'ouverture de l'invocabilité est toutefois plus souvent la conséquence de la convergence existant entre certains des objectifs ou normes de l'Union et ceux des accords de l'OMC qu'un outil utilisé pour équilibrer la mondialisation du droit et ordonner le pluralisme juridique.
Les techniques employées à l'échelon multilatéral pour inciter les États à rapprocher leurs législations et à renforcer leur coopération afin de prévenir et de réprimer la commission d'infractions graves par des groupes criminels structurés se multiplient et se diversifient.
L'internationalisation des sources du droit pénal, conjuguée à l'inclusion des problématiques criminelles dans les objectifs de préservation de la paix et de la sécurité, tend à favoriser l'accroissement de l'intervention des organisations internationales dans la lutte contre la criminalité organisée, ainsi que le développement d'enceintes multilatérales de coopération inter-étatique. Pour l'Europe du Sud-Est, il en résulte un enchevêtrement difficilement lisible de normes, d'actions et de mécanismes d'application.
Dans le contexte spécifique du processus de transition démocratique expérimenté par la plupart des États de cet espace géographique, l'enjeu de la mise en cohérence de ces instruments n'est pas seulement celui de l'efficacité. Il concerne également la préservation et la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que la consolidation de l'état de droit.
A partir des concepts de fédération et d'empire et à travers une analyse historique et juridique, ce travail tente de répondre à certaines interrogations sur la nature étatique de la Russie.
Si ce pays est formellement un Etat fédéral depuis l'adoption de la Constitution du I2 décembre 1993, la pratique constitutionnelle montre la difficulté de cet- État à concilier diversité et unité et à respecter les principes du fédéralisme. Il est d'ailleurs plus juste de parler pour la Fédération de Russie de processus fédéraliste en cours que de système fédéral clairement établi. Ainsi peut-on constater qu'à une première période placée sous les signes de la désunion et de l'" extraconstitutionnalisme o a succédé une période de reprise en main par le pouvoir central, au nom d'une " reconstitutionnalisation " des rapports fédératifs mais souvent au détriment des valeurs de liberté et d'association propres à l'idée fédérale.
Finalement, seule l'histoire millénaire de la Rassie peut expliquer les résurgences impérialistes de cet Etat. 1.a Russie millénaire a, en effet, été marquée par un fédéralisme qu'on peut qualifier d'" inauthentique" et qui fut principalement représenté par la figure de l'empire, que celui-ci ait été avoué (Empire des Tsars) ou masqué (Union soviétique). Le poids de cet héritage impérial explique donc les difficultés de la Russie dans la gestion de la diversité et dans la mise en place d'une fédération authentique, sous-entendue démocratique.
C'est autour de la structure juridique de l'État que les relations aussi bien internationales qu'interpersonnelles sont aujourd'hui articulées, dans un contexte fortement marqué par l'hypothèse rebattue d'un " retour du religieux " dans la marche du monde.
Le but de cette étude est de confronter ces deux éléments spirituel et temporel : quel est donc l'impact réel de l'Islam sur l'organisation constitutionnelle des États apparemment fondés sur son message sacré ? La réflexion ici proposée vise à définir et à analyser les données fournies par le référent islamique à propos de la structure politique d'un État mis à son service, notamment à travers l'examen approfondi de certains exemples emblématiques comme l'Arabie saoudite, l'Égypte, et l'Iran.
Elle s'adresse aussi bien à un public de spécialistes qu'à un néophyte ignorant tout de cette thématique particulière.
Traditionnellement perçu comme le berceau des droits et libertés, le Royaume-Uni est le premier pays à les avoir consacrés dans des documents historiques qui ont posé les bases de l'histoire politique des droits de l'homme. Pourtant, si cette culture des libertés a pendant longtemps caractérisé le système constitutionnel britannique, le déclin qu'elle a connu au cours des années 1980 a appelé à une modification des modalités traditionnelles de leur protection, qui s'est concrétisée par l'adoption du Human Rights Act 1998. Mais, ce nouvel instrument de protection des droits et libertés, qui ambitionne de donner davantage d'effets aux droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme dans l'ordre juridique britannique, est-il parvenu à relever le défi qui lui était lancé en ravivant l'esprit des libertés propre à la psyché britannique ? La réponse à cette question nécessite d'apprécier les incidences du Human Rights Act 1998, un document à la croisée du droit constitutionnel et du droit conventionnel, non seulement sur l'efficacité de la protection des libertés mais, plus largement, sur la Constitution du Royaume-Uni. L'étude du système de protection britannique des droits et libertés, tel qu'il est transformé par le Human Rights Act 1998, est alors l'occasion d'envisager la teneur de la contribution du Royaume-Uni au débat sur la protection des droits fondamentaux ainsi que l'apport de l'expérience britannique au développement du constitutionnalisme.
Emergeant à la fois de la transition démocratique et étant un moyen de son introduction, la presse des Etats postsoviétiques devient un instrument d'affermissement. du pouvoir. Trouvant sa place dans la norme constitutionnelle, la liberté de la presse puise sa source, voire son dynamisme dans la jurisprudence des Cours constitutionnelles. Compte tenu des spécificités du contentieux constitutionnel de transition, la protection de la liberté de la presse reste encore insuffisante. Néanmoins, les Cours constitutionnelles participent indirectement à son établissement utilisant les techniques déjà employées dans d'autres affaires. Ainsi, l'étude de la jurisprudence russe, ukrainienne, moldave, bélarusse et azérie permet d'appréhender leurs différences et leurs similitudes propres à chacun de ces cinq Etats. En effet, le juge constitutionnel n'est pas un simple gardien de la norme fondamentale, mais il est aussi un gardien des valeurs du changement de régime cherchant à assurer le principe de la séparation des pouvoirs et la conciliation des droits fondamentaux. Cette étude s'attache dès lors à découvrir le cadre constitutionnel et le contexte politique dans lequel se positionne la liberté de la presse ainsi que son contenu tout en mettant en avant ses principes fondamentaux : la liberté d'expression et le pluralisme politique.
Cet ouvrage procède d'une recherche doctorale portant à la fois sur le rôle des États et des cours régionales de contrôle des droits de l'Homme en matière d'effectivité de la justice pénale internationale dans l'ordre juridique interne des États.
En effet, les crimes internationaux constituent des infractions dont les conséquences dramatiques affectent la communauté internationale dans son ensemble. Cette dernière s'est engagée, notamment depuis le procès de Nuremberg, dans la poursuite des auteurs présumés de ces crimes à travers les différents mécanismes juridiques mis en place par la justice pénale internationale. Dans ce sens, il incombe essentiellement aux États d'assurer l'effectivité de cette justice. La première partie de cet ouvrage réfléchit, de manière globale, aux fondements des obligations étatiques de répression des crimes internationaux et à l'amélioration de l'effectivité de la justice pénale internationale dans l'ordre juridique interne des États.
La deuxième partie met l'accent sur l'intervention de nouveaux acteurs dans la mise en application de la justice pénale internationale. Dans ce sens, l'implication des cours régionales de contrôle des droits de l'Homme dans la répression nationale des crimes internationaux a été analysée en prenant en considération les exigences internationales de répression des crimes internationaux qu'elles rappellent constamment aux États. En réalité, la jurisprudence de ces cours régionales constitue un apport décisif en termes d'effectivité de la justice pénale internationale dans la mesure où elle met à la charge des États un certain nombre d'obligations positives afférentes à la répression des auteurs de crimes internationaux et aux réparations dues aux victimes. Ainsi, cette jurisprudence renforce la lutte contre l'impunité.
La thèse se propose de montrer le fédéralisme, son évolution en Russie contemporaine et les relations entre le pouvoir fédéral et la République du Tatarstan dans la période postsoviétique.
La notion de fédéralisme est l'un des objets privilégiés des sciences politiques depuis l'apparition des premiers États fédéraux. En Russie, le problème des rapports fédératifs est l'une des clés de la politique contemporaine, puisque le mécanisme de l'interaction entre le Centre fédéral et les régions révèle l'état du système politique dans son ensemble. De ce fait, réfléchir sur les problèmes du fédéralisme donne la possibilité d'examiner la forme et les caractéristiques structurelles du fonctionnement de ce régime politique spécifique.
Pour mener à bien la recherche, le travail, à travers l'analyse des fondements structurels et juridiques et l'analyse de l'interaction entre les pouvoirs fédéraux et subfédéraux, répond aux questions relatives à la portée des facteurs historiques dans l'instauration du fédéralisme en Russie, à la nature des relations Centre-périphérie, au rôle des personnalités politiques et l'impact des réformes sur le fédéralisme, aux rapports entre les textes constitutionnels et leur application dans la période 1990-2012.