Les relations de l'homme au milieu naturel ont longtemps été pensées dans le cadre d'une opposition terme à terme entre nature et société. La crise écologique nous invite à interroger ce partage, à revenir sur le sens et les limites de ce clivage. Ce livre vise à éclairer les ambiguïtés du rapport à la nature des modernes à partir de trois oeuvres majeures?: Les formes élémentaires de la vie religieuse d'Émile Durkheim, La pensée sauvage de Claude Lévi-Strauss et Par-delà nature et culture de Philippe Descola.
En quoi peut-on parler de la nature comme d'un fait social?? Quelle signification et quelle valeur accorder aux sociétés restées indifférentes au «?grand partage?»?? Quels concepts mobiliser aujourd'hui pour faire face à la transformation de nos rapports collectifs à la nature?? Alors que la nature est de plus en plus humanisée et que les affaires humaines doivent en retour toujours davantage composer avec elle, l'opposition du naturel et du social semble perdre toute pertinence.
Les séries télévisées, comme toute «?culture populaire?», transforment la définition de l'art?: d'objet de distinction, il se fait oeuvre d'éducation morale et politique. En mettant en avant des questions politiques, et en y apportant des réponses radicales, elles éveillent les sensibilités sur des enjeux contemporains majeurs.
Menace terroriste et espionnage (Homeland, The Americans, Le Bureau des légendes), ambition personnelle des dirigeants (Game of Thrones, Baron Noir), éthique du capitalisme néolibéral (The Good Place), féminisme et intersectionnalité (Orange is the New Black, I May Destroy You, Killing Eve), conflit israélo-palestinien (Fauda, Our Boys), racisme et antisémitisme (Lupin, Watchmen, The Plot Against America), impact de la fiction sur la réalité géopolitique (Serviteur du peuple), fatalité des inégalités sociales (The Wire, Engrenages), menace apocalyptique (The Walking Dead), dérives des nouvelles technologies (Black Mirror), violence du système carcéral (Orange is the New Black)?: sur tous ces éléments, les séries fournissent des référents culturels communs forts, qui peuplent conversations ordinaires et débats politiques. Leur impact sur les régimes démocratiques, conçus comme espaces de délibération, de contestation et de transformation sociale, est majeur.
Un décryptage d'une vingtaine de séries pour en souligner la puissance éthique et politique.
En août?1940, le maréchal Pétain, chef de l'État français, décide de rassembler les anciens combattants dans une organisation unique, afin de relayer sa politique dans tout le pays. Avec plus d'un?million d'adhérents, la Légion française des combattants s'impose comme le seul mouvement de masse du régime de Vichy.
La propagande pétainiste présente ces légionnaires comme les symboles de la popularité du chef de l'État, mais la réalité est plus complexe. De fait, les anciens combattants étaient déjà répartis dans l'entre-deux-guerres dans des associations très actives dont la Légion prend, à bien des égards, la suite.
Au plus près de ses membres et de leurs activités concrètes, Anne-Sophie Anglaret retrace la naissance, l'action et le déclin des sections de la Légion et montre la force des sociabilités locales par-delà le changement de régime. Elle met aussi en lumière la grande porosité idéologique entre les principes de la révolution nationale et les associations conservatrices d'avant-guerre.
Elle permet ainsi de mieux comprendre ce qu'a été la Légion et, partant, ce qu'a été Vichy?: non pas une parenthèse, mais l'adaptation d'une tendance de fond à un contexte exceptionnel.
Long ou court, opaque ou diaphane, masculin ou féminin, porté serré ou flottant au vent, le voile est un objet vestimentaire malléable et familier dont, en terres chrétiennes, toutes les femmes (et occasionnellement quelques hommes) durent longtemps se parer. Pour obéir aux injonctions des Pères de l'Église et dire leur soumission à l'ordre patriarcal, mais aussi pour séduire, se distinguer, devenir adulte, se marier, entrer en religion, pleurer les morts, jouer les élégantes, travailler...
Parce que les voiles occultent et suggèrent la présence de la chair et du cheveu, ils suscitent aussi fantasmes et peurs. Parce qu'ils mettent en cadre nos visages, ils attisent les talents des plus grands artistes et la suspicion des moralistes. Parce qu'ils sont un patrimoine français, enfoui et presque disparu, ils méritent d'être proprement envisagés.
Dictionnaire de l'Empire ottoman Volume 1 | A-J Volume 2 | K-Z Comment rendre compte des multiples facettes d'un empire formé à la fin du xiiie?siècle, contemporain de Philippe Le Bel, qui n'a disparu que dans les premières décennies du XXe des contrecoups de la Guerre de 14-18 ? D'un empire à la fois multilingue et multiconfessionnel, devenu une puissance mondiale de premier ordre et qui s'étendait à son apogée d'Alger à Budapest, en passant par Alexandrie, Bagdad et bien sûr Constantinople, sa capitale ?
En 720 notices, rédigées par 175 auteurs de nationalités diverses, ce dictionnaire relève le défi par une approche globale, transversale et transdisciplinaire, croisant histoire politique, sociale, économique, religieuse, militaire et culturelle. Cette entreprise de grande ampleur, attentive aux nouvelles perspectives et problématiques historiennes, s'est imposée comme une référence incontournable.
Retraçant un parcours de recherche qui l'a mené de l'Afrique du Sud au Maroc en passant par l'Éthiopie, François-Xavier Fauvelle fait ressortir les enseignements d'une histoire qu'il n'est plus permis de nier ou d'ignorer.
Il pointe les défi s d'une documentation fragmentaire qui suppose d'employer fouilles archéologiques et écrits anciens, traditions orales et usages contemporains du passé, tout en déconstruisant les représentations héritées des siècles de la traite des esclaves puis du colonialisme.
Apparaissent alors les richesses d'une histoire marquée par une singulière diversité d'économies, de langues, de croyances religieuses et de formations politiques.
Réinscrite dans ses interactions avec les mondes extérieurs, cette histoire renouvelle notre compréhension des mondes africains anciens et permet de repenser les phénomènes globaux, tels ceux du Moyen Âge, à partir de l'Afrique.
On ne se comprend pas. Jamais tout à fait en tout cas. En amour, en amitié, comme dans les sphères administratives, politiques ou professionnelles, la compréhension parfaite et réciproque est rare.
Pourquoi l'incompréhension est-elle la norme dominante de nos relations??
Dans cet ouvrage de vulgarisation, Éric Dacheux apporte des réponses claires, en mobilisant tout le savoir scientifique des sciences de l'information et de la communication.
Une fois réglées les questions de définition de la communication, de son ambivalence fondamentale, il décrypte les concepts clés de message, d'écoute, d'identité ou de contexte. Surtout, il s'attache à comprendre les difficultés de la relation humaine, celle qui nous permet de vivre dans un monde commun, sans occulter le rôle inquiétant des outils numériques.
Un livre clair et concis pour comprendre le langage et les concepts de la communication.
La barbe ne fait pas le philosophe « Femme, être incomplet et condamné à une éternelle enfance, tu prétends t'élever à la philosophie?! Quel aveuglement est le tien???» Les mots de Victor Cousin, personnage clé de l'institutionnalisation de la philosophie en France au XIXe?siècle, donnent le ton. La IIIe?République perpétue cette politique d'exclusion?: tandis que la philosophie est élevée au rang de couronnement des études secondaires et de pratique culturelle républicaine par excellence, chargée de suppléer la religion dans l'organisation morale de la société, elle se trouve exclue par la loi des cours prodigués aux jeunes filles.
Qu'est-ce donc qu'être philosophe en France entre 1880 et 1949 ? C'est d'abord et avant tout porter une barbe : être un homme. Pourtant, Plutarque défiait déjà quiconque de mesurer la sagesse du penseur à la longueur de son poil... Cette situation n'est pas sans susciter des rébellions, des transgressions, parfois des travestissements - et, ainsi, des évolutions.
Mêlant combats individuels et collectifs, cette enquête novatrice révèle un pan de l'histoire des femmes aux XIXe et XXe?siècles et fait ressortir une galerie de femmes philosophes qui s'affirment en dépit des obstacles?: de Jenny d'Héricourt et Julie Favre jusqu'à Dina Dreyfus et Simone de Beauvoir, en passant par Jeanne Crouzet, Julie Hasdeu, Clémence Royer, Jeanne Baudry, Léontine Zanta, Alice Steriad, Lucy Prenant, Hélène Metzger, Renée Déjean, Yvonne Picard, Simone Weil ou Marguerite Buffard Flavien.
Pourquoi l'Angleterre a-t-elle réussi à bâtir un immense empire colonial et maritime, et pas la Chine?? Comment Athènes, Rome, et Venise ont-elles successivement pris le contrôle de la Méditerranée et pourquoi Byzance n'y est-elle pas parvenue?? Pourquoi des empires maritimes naissants, comme ceux des Vikings ou des Hollandais, n'ont-ils jamais su pérenniser leur domination??
Des Phéniciens aux colons britanniques, de Carthage à Zanzibar, de Philippe II d'Espagne à Napoléon, de la bataille de Lépante à celle de Midway, et jusqu'à l'hyperpuissance navale américaine, la vie et la mort des empires maritimes se déploient ici dans une fresque magistrale, cartes à l'appui.
Sous la direction de Henry de Lumley L'Univers, la Vie, l'homme Émergence de la conscience Qui y a-t-il aux origines de l'Univers ? Et de la Vie ? D'où vient-on ? Quand la conscience émerge-t-elle ? Quelle a été son évolution ? Comment l'espèce humaine s'est-elle adaptée à son environnement ? Et quel sera son avenir ? Les nouvelles technologies vont-elles réinventer l'homme ? Peut-on, par des outils modernes, comprendre les mécanismes de la pensée ?
C'est à ces questions vertigineuses que répondent préhistoriens, physiciens, neurologues, biologistes, philosophes et théologiens, dans ce livre tiré d'un cycle de travaux au Collège des Bernardins, à l'initiative de Henry de Lumley.
Un ouvrage ambitieux et didactique, clair et accessible, qui interroge les grandes énigmes de la vie. Un sommaire prestigieux réunissant, entre autres, Olivier Abel, Jean-Claude Ameisen, Yves Coppens, Stanislas Dehaene, Étienne Klein et Pierre Léna.
«?Dieu a donné à la France l'empire des mers?»?: Richelieu fondait cette conviction sur un royaume ouvert sur trois mers (Manche, Méditerranée et mer du Nord), un océan (l'Atlantique), et des peuples marins aussi audacieux qu'expérimentés - Bretons, Normands, Basques ou Provençaux.
Comment expliquer alors que notre pays, aussi richement pourvu d'atouts, n'ait saisi qu'en partie le destin maritime qui s'offrait à lui?? L'aventure du grand large a longtemps été en butte à la préférence continentale?: les Normands sillonnaient les côtes du Brésil quand les guerres d'Italie occupaient nos souverains, Louis XIV laissa passer sa chance de maîtriser les mers pour mieux se consacrer à sa gloire terrestre et Louis XV négligea un empire sur lequel le soleil ne se couchait jamais. Napoléon III relança certes une ambition maritime mais la perte de l'Alsace-Lorraine conduisit la France à se tourner de nouveau vers le continent.
De Philippe Auguste à Charles de Gaulle, des tentatives d'implantation en Floride à la conquête de la Louisiane, du premier arsenal de Rouen à Port 2000 au?Havre, de la bataille de l'Écluse à celle de Guetaria, des Bretons sillonnant le Pacifique aux porte-conteneurs de la CMA-CGM, des premiers bâtiments à vapeur aux sous-marins nucléaires, cet atlas déploie la grande épopée de la France des mers et de ses marins.
Grand Prix Jules Verne 2017 de l'Académie littéraire de Bretagne et Pays de Loire
Sur les rives de la Méditerranée, au Moyen Âge, l'esclavage fut un phénomène largement diffus. Il était partout, dans les villes ou bourgs ruraux, dans l'artisanat ou dans la garde des troupeaux, dans les palais patriciens comme dans les maisons plus modestes des artisans. À la suite de travaux qui ont levé le voile qui recouvrait la pratique de l'esclavage dans l'Europe chrétienne, Jean-Claude Hocquet livre ici une étude passionnante.
Restituant au plus près des sources le travail et le quotidien des esclaves, leur provenance, leur capture, les marchés et les procédures de rachat, il dresse une véritable cartographie du trafic des esclaves. D'abord cantonné aux eaux de la mer Noire et de la Méditerranée orientale, il se déplace vers les pays balkaniques et l'Afrique. Lisbonne, Lagos, Séville et Cadiz deviennent alors les principaux pourvoyeurs de l'Europe méditerranéenne en esclaves de couleur?; Gênes, Venise, Naples, Barcelone ou Valence, des cités esclavagistes de premier plan.
Jean-Claude Hocquet établit surtout que la diffusion de l'esclavage eut pour objectif essentiel de parer les revendications d'augmentation des salaires avancées par les travailleurs et non de combler le vide démographique provoqué par la Peste noire du milieu du XIVe?siècle. Les religions, alors, n'ont pas été un frein à cette pratique, en terres chrétiennes comme en terres d'islam.
Une étude particulièrement fine et documentée.
À l'origine de ce livre, un paradoxe : l'action outillée a été beaucoup plus étudiée chez l'animal, où elle est l'exception, que chez l'homme, où elle est la règle. Or c'est en faisant de cette action le modèle d'ensemble de ses activités matérielles que l'espèce humaine s'est constituée en tant que telle.
Dans le monde animal, l'action, même outillée, ne fait intervenir que des mécanismes corporels innés, qui doivent certes être ajustés et perfectionnés par apprentissage, mais dont la mise en oeuvre reste largement automatique. Chez l'homme, au contraire, l'intervention de l'outil dans l'action implique un partage de l'attention inédit entre fins et moyens. Comment les aptitudes mentales nécessaires ont-elles pu se développer ? Et si ce partage de l'attention était à l'origine de la conscience d'un réel ayant une existence indépendante, et par suite de la conscience de soi ?
Ainsi, ce ne serait pas l'homme qui fait l'outil, mais bien plutôt l'outil qui fait l'homme...
Réduction ou abattage des troupeaux, déplacements de ceux qu'on appelait les « Lapons » (« porteurs de haillons » en suédois), intégration à marche forcée de ces « populations primitives » qu'il convient de civiliser : en signant en 1919 une Convention sur le pâturage des rennes, Suède et Norvège initient en réalité la dislocation de la société samie du Nord, cette « civilisation du renne » organisée depuis des siècles autour d'une transhumance peu soucieuse des frontières nationales.
C'est une histoire douloureuse et méconnue que s'attache à exhumer cette enquête qui restitue le parcours d'un ensemble de familles samies de l'entre-deux-guerres. Tissant souvenirs des derniers témoins, récits, chants et photographies, elle fait entendre une voix jusque-là étouffée, ainsi que la poésie d'un certain rapport au monde et à la nature.
Les stars du football comptent aujourd'hui parmi les salariés les mieux payés au monde et les personnalités médiatiques les plus en vue. Source de tant de discussions et de commentaires, cette situation n'est pourtant jamais interrogée dans ses fondements mêmes?: pourquoi exceller balle au pied peut-il mener - à condition d'être un homme - à la richesse et à la gloire?? Qu'est-ce qui explique que des «?exécutants?», issus pour majorité des classes populaires, se voient attribuer une telle valeur économique et symbolique??
La réponse suppose de multiplier les angles de vue et les sources, de la fin du XIXe?siècle à nos jours. Cette vaste enquête revient ainsi sur la naissance du football pour décrire comment ce nouvel espace de consécration s'est institué. Elle décrypte ensuite les dynamiques de valorisation, impulsées par les présidents de clubs, les médias et les spectateurs, qui ont concouru à sa popularité croissante. Elle explore les conditions d'émergence d'une configuration salariale favorable aux joueurs et explique, enfin, pourquoi une petite minorité d'entre eux capte une grande partie des flux d'attention et d'argent qui circulent dans ce sport collectif.
En apparence triviale, la question de l'importance conférée aux joueurs conduit à porter un tout autre regard sur le football. Plus largement, elle nourrit une réflexion novatrice sur la production de la valeur et la fabrique contemporaine des «?grands hommes?».
Les différentes facettes de la question environnementale constituent l'un des principaux enjeux du XXIe?siècle, et interrogent à nouveau frais le rapport économique, éthique et esthétique que les êtres humains entretiennent avec la nature.
Les réflexions savantes autour de cette problématique ne sont cependant pas récentes puisqu'elles remontent à la première Révolution industrielle et aux progrès tant scientifiques que techniques qui l'ont accompagnée. Elles mobilisent plusieurs champs qui s'en revendiquent et se la disputent, au premier rang desquels la géographie et l'écologie.
Si ces deux disciplines s'intéressent à l'interface entre nature et société, elles ne la traitent pas de façon identique. En Europe occidentale, en Amérique du Nord, en Russie ou au Japon, leurs penseurs n'ont jamais cessé de questionner leurs conceptions et travaux réciproques sur des bases philosophiques variées, parfois opposées.
L'analyse de cette histoire croisée depuis le début du XIXe?siècle jusqu'à nos jours permet de découvrir aussi bien leur relation, souvent tumultueuse, que leur fonction sociale ou politique. Elle fait comprendre pourquoi, à partir de la seconde moitié du XXe?siècle, l'écologie a pris le pas sur la géographie dans l'approche environnementale, signant le triomphe du "?vivant?" sur le "?social?" ou le "?spatial?".
Considéré comme un des grands anthropologues français du XXe siècle, Philippe Descola réalise son premier terrain en Amazonie. En ethnographe, il vit des années durant au sein de la tribu des Jivaros Achuar, et observe les relations que ces Amérindiens entretiennent avec les êtres de la nature. En ethnologue, il montre que l'opposition traditionnellement établie en Occident entre nature et culture ne se vérifie pas chez les Achuar, qui attribuent des caractéristiques humaines à la nature. En anthropologue enfin, il définit quatre modes de rapport au monde que sont le totémisme, l'animisme, le naturalisme et l'analogisme permettant de rendre compte des relations de l'homme à son environnement.
En un texte clair et didactique, Philippe Descola nous restitue les grandes étapes de son parcours et nous introduit de manière vivante à la pratique de l'anthropologie et à une « écologie des relations ».
Organisée selon un plan thématique, cette anthologie des idées politiques au Machrek et au Maghreb rend compte de la façon dont le gouvernement des populations, l'organisation des sociétés, la justice et le bien commun ont été pensés, formulés et mis en mouvement de 1920 à 2011. Composée d'écrits juridiques, d'articles de presse, de discours publics, elle réunit des «?producteurs?» d'idéologie aux profils divers?: hommes issus d'institutions religieuses, intellectuels, militants et leaders politiques.
Cet ouvrage poursuit deux objectifs. D'abord, décloisonner les catégories que sont les «?nationalistes?», «?islamistes?», «?gauchistes?» et «?libéraux?», pour montrer les nombreuses circulations que celles-ci autorisent. Ainsi, nombre de militants et d'intellectuels sont passés de la gauche à l'islam après 1967 puis au libéralisme à partir des années 1980. Ensuite, insister sur la manière dont ces idées informent les rapports de pouvoir. Loin d'être de simples codes de conduite basés sur des visions du monde souvent utopiques, elles sont aussi des instruments discursifs mobilisés dans le cadre de luttes.
Structurée autour de quatre grands thèmes (les frontières de l'umma?; l'exercice du pouvoir politique soulignant la centralité du paradigme autoritaire?; l'économie et le développement?; et enfin l'autocritique, revenant notamment sur les facteurs endogènes du «?malheur arabe?»), cette anthologie permet de restituer la diversité des références qui ont nourri l'imaginaire et l'histoire politique et sociale des sociétés du Machrek et du Maghreb au XXe?siècle.
Comment s'est construit, au fil du XXe?siècle et jusqu'à nos jours, le gouvernement de «?la?» nature en Asie, en Afrique et au Moyen-Orient?? De la création des premières réserves de chasse dans les colonies africaines au nom de la protection de la faune aux modèles actuels de conservation communautaire privilégiés par les organisations internationales, cette ambitieuse recherche croisant histoire, géographie, science politique et écologie, revient sur les négociations et luttes provoquées par le «?colonialisme vert?».
Qu'il s'agisse de la gestion impériale des forêts à Singapour ou au Liban, de l'introduction de nouvelles espèces dans l'Afrique coloniale française ou de la promotion de la «?récolte?» de la grande faune, des conflits contemporains autour du tigre, de l'éléphant et du crocodile marin en Inde, ces études font ressortir l'entremêlement des temps coloniaux et post-coloniaux. Avant comme après les indépendances, protéger la nature, c'est exercer le pouvoir. Et hier comme aujourd'hui, la conservation globale de la nature aux Suds évolue au rythme d'une contradiction permanente entre prédation et protection.
Au centre d'un cirque de montagnes, Ispahan surgit de l'aride plateau iranien. Une oasis d'où émergent des dômes étincelants, les hautes tourelles des minarets et la rumeur d'une cité caravanière. Depuis le xviie?siècle, tous les voyageurs gardent un souvenir inoubliable de cette cité merveilleuse, alliant les atours d'une capitale d'Empire et les aménités les plus inattendues d'un carrefour commercial. oeuvre d'art totale, ce joyau préservé de Shah Abbas Ier (1588-1629) unit urbanisme, architecture et ornement. Autour d'un axe principal - le Chahar Bagh -, s'articulent une myriade de palais conviviaux, de pavillons aux chatoyantes teintes, tandis que places, canaux et jardins dessinent des ambiances chaleureuses structurées par l'eau et le végétal.
L'architecte Philippe Revault nous fait découvrir toutes les facettes visibles de cette ville-jardin (formes urbaines, habitat, rapport au climat, à l'eau) pour comprendre comment s'est formée l'idée même de cette ville. Une idée que Seyyed Mohsen Habibi et Negar Habibi, dans leur importante contribution, mettent en relation avec la renaissance philosophique et théologique du chiisme duodécimain et "l'école d'Ispahan".
Jean-Claude Golvin, architecte et archéologue, qui dirige la collection «?L'Esprit des lieux?», donne ici une restitution originale d'Ispahan, à découvrir.
Faits divers & vies déviantes XIXe-XXIe siècle Un «?chourinage?» dans la Seine en 1890, l'empoisonnement d'une archiduchesse d'Autriche par ses bas noirs en 1894, l'inquiétude autour d'une maison hantée à Yzeures-sur-Creuse en 1897, la mystérieuse disparition d'un étudiant en 1906, l'explosion de l'outil piégé d'un marbrier en 1914, un meurtre de chien en 2015?: voilà quelques-unes des affaires sélectionnées ici par Roy Pinker dans la presse du XIXe?au XXIe?siècle. Ces faits divers, incidents, accidents, canulars, délits, voire crimes, mettent en scène une incongruité du quotidien, un déraillement de la logique, une petite vie obscure ou infâme soudainement rendue visible par un journal.
Ces petits faits curieux, loin d'être insignifiants, apparaissent alors comme les symptômes des inquiétudes ou des enthousiasmes d'une société?; ils forment les éléments significatifs d'un vaste imaginaire social et médiatique, qui passionnait l'historien du crime, Dominique Kalifa, auquel ce livre est dédié, abordant tous ses sujets de prédilection?: le fait divers, le sensationnalisme, les marginaux, la Belle Époque, le bagne, les bas-fonds, l'érotisme.
Les masques et la mosquée ;
L'empire du Mâli (XIIIe-XIVe siècle) ;
Que sait-on de l'empire du Mâli?? Partant d'une analyse de la notice Wikipédia consacrée à cette formation politique majeure du Moyen Âge, François-Xavier Fauvelle s'interroge sur les raisons de l'obscurité qui continue de l'entourer. Puis, patiemment, il reconstitue des savoirs modestes et solides, avant d'assembler avec virtuosité les multiples pièces, issues des textes arabes, de la tradition orale et des fouilles archéologiques, du vaste «?puzzle?» documentaire qu'est l'histoire du Mâli.
Qu'ont Soundjata et Charlemagne en commun?? Quel rôle le fameux pèlerinage de Mûsâ à La?Mecque joue-t-il dans la légitimation du pouvoir?? Attentif aux échos de la geste des mansa, les empereurs mâliens, jusque dans Le Roi Lion de Walt Disney, cette enquête éclaire l'histoire dynastique du Mâli impérial des XIIIe et XIVe?siècles, avant de nous faire observer de très près les rituels d'une cour où, les jours de fêtes, les masques dansent devant la mosquée. La compréhension des logiques économiques, religieuses et politiques du Mâli médiéval permet, en point d'orgue, de proposer une nouvelle hypothèse de localisation de la capitale de l'empire, dont la recherche a agité historiens et archéologues depuis le milieu du XIXe?siècle.
Par-delà cette ville depuis longtemps disparue, c'est bien l'intelligence de l'Afrique médiévale que met en jeu cette histoire renouvelée.